« Votre visite est la première en cinq décennies. Votre visite est historique...» a affirmé le
président birman Thein Sein lors de la visite de la secrétaire d'État américaine, Hillary Clinton, entre le 30 novembre et le 3 décembre 2011 (1). Le chef de l'État fait ici référence aux 50 ans d'absence de relation séparant les
États-Unis de la
Birmanie. Washington avait tôt fait de couper les liens lors de la prise de pouvoir de la junte militaire en 1962.
Aujourd'hui, les deux États se rapprochent et entrent dans un processus d'exploration des possibilités pour poursuivre la récente transition
démocratique du nouveau
gouvernement birman. Washington se dit prêt à donner tout encouragement si cette tendance se maintient (2).
En effet, depuis mars 2011, le nouveau
gouvernement civil birman adopte des réformes
démocratiques. Libération de prisonniers politiques, assouplissement de la censure, liberté syndicale et le retour à la diversité des partis politiques ne sont que des exemples des réformes birmanes (3). Plus important encore, les
autorités ont demandé aux militaires de cesser les combats contre les armées
révolutionnaires et les armées de libération. La plupart d'entre elles ont accepté le cessez-le-feu (4).
Washington encourage par les mots, sans plus
Pour Clinton, il n'est pas encore envisageable de défaire les sanctions et le boycottage américain. L'administration de Barack Obama veut plutôt adoucir les pénalités à mesure que l'État birman chemine vers la fin de l'oppression (5).
La voie est encore loin d'être tracée lorsque la secrétaire s'immisce dans la politique intérieure du pays en demandant la libération totale de tous les prisonniers politiques. Washington en vient aussi à soupçonner les
autorités birmanes d'avoir importé des matériaux nucléaires de
Corée du Nord, sans pour autant envisager qu'elles aient un programme dit « dangereux ». Thein Sein se défend et se dit prêt à recevoir les inspecteurs de l'Agence internationale de l'Énergie atomique (AIEA) (6). Cette
déclaration est tout le contraire d'il y a deux ans, lorsque le
gouvernement birman avait refusé les demandes d'enquête de l'agence (7).
À court terme, Washington pourrait, si les réformes se maintiennent, envoyer de nouveau un
ambassadeur après 20 ans d'absence. Il en est de la même condition concernant l'apparition de l'aide au développement. Les Américains seraient peut-être un jour intéressés à la grande diversité de ressources naturelles présentes en
Birmanie, si de nouvelles relations économiques voient le jour (8). Avec cette ouverture, plusieurs représentants de compagnies occidentales et Sud-est asiatiques commencent d'ailleurs à tâter le terrain et à voir les possibilités d'association avec l'État birman (9).
Ce sont les premières étapes à court terme que les Américains pourraient enclencher avec le pays. C'est après mure réflexion que la secrétaire d'État jugera s'il est bon ou non de reprendre les relations diplomatiques et économiques. Pour ce faire, l'administration Obama aura besoin de ses recommandations, en plus d'un éventuel accord du Congrès américain (10).
Les rencontres de la secrétaire d'État
Durant sa visite de trois jours, Hillary Clinton a rencontré son homologue Wunna Maung Lwin, ministre des Affaires étrangères, peu avant son entretien avec le
président Thein Sein. Ce dernier, au pouvoir depuis mars 2011, est le premier chef d'État issu d'un
gouvernement civil après 25 ans de junte militaire (11).
Dans les derniers temps de sa visite, Clinton a échangé avec l'opposante politique birmane et lauréate du Nobel de la paix, Aung San Suu Kyi. La diversité des partis politiques maintenant réadmise au pays, San suu Kyi se présentera aux prochaines élections partielles en avril prochain (12). Elle est le symbole de la réconciliation nationale et de la fin des conflits ethniques. Après 14 ans de détention en tant que prisonnière politique, elle se dit aujourd'hui confiante par ce récent changement. Par sa popularité, elle a de fortes chances de se retrouver prochainement en chambre. Elle a d'ailleurs le soutien de la part de la
Maison-Blanche (13).