Le Parti pirate d'Islande en a surpris plus d'un lors des élections législatives du 27 avril 2013, réussissant son pari d'accéder au Parlement. Il s'agit d'une petite représentation qui leur donne tout de même trois sièges à l'Althing, le Parlement islandais, sur une possibilité de 63. La jeune formation est fin prête à collaborer avec les partis qui seront intéressés par les mêmes enjeux qui la préoccupent.
Montée du centre droit et conquête des pirates
C'est une véritable reconquête par le
centre droit politique qui a eu lieu le 27 avril, car depuis 2009 c'était la gauche qui détenait le pouvoir (1). Les suffrages se sont répartis entre le Parti de l'indépendance (droite) et le Parti du progrès (centre) qui ont respectivement recueilli 26,7 % et 24,4 % des voix, leur attribuant 19 sièges chacun.
Ils sont suivis par l'Alliance-Parti social-démocrate (gauche) avec 12,9 % des voix et 9 sièges, perdant près de la moitié de ses élus. Le Mouvement de gauche-verts (
extrême gauche) a obtenu 10,9 % des votes et 7 sièges, accusant une perte de 7 sièges par rapport à 2009. Quant au parti de l'Avenir radieux et au Parti pirate islandais, ils ont obtenu 8,2 % et 5,1 % des votes, remportant 6 et 3 sièges au Parlement. Le Parti du progrès se dit d'ailleurs prêt à travailler avec le Parti de l'indépendance afin de former la coalition nécessaire pour gouverner.
Le Parti pirate a fait une montée plutôt discrète durant la campagne, mais a été très actif dans les réseaux sociaux pour rejoindre les électeurs concernés par ses enjeux, grugeant l'électorat de gauche (2). En moins d'un mois, il a su attirer l'attention et regrouper les partisans. Il a réussi à atteindre le seuil de 5 % nécessaire pour être représenté, donc il pourra désormais avoir aussi l'aide des deniers publics pour se financer.
Avec ses trois sièges, il sera difficile pour le Parti pirate de faire ou défaire une majorité à l'Althing (3). Néanmoins, il peut s'arrimer aux questions qui touchent à son expertise, notamment à la
gouvernance, à la protection de la vie privée ou même à la liberté numérique. Cette formation pourra prendre avantage de ces perches et promouvoir ses idées dans l'espace public. Par contre, une chose qui pourrait lui nuire serait que les thèmes abordés à l'assemblée arrivent au mauvais moment.
Píratar : un parti émergent
Píratar est le mot islandais pour désigner le Parti pirate. Créée en novembre 2012, cette formation est bien jeune, mais pleine de propositions avant-gardistes quant à la modernisation de l'information à l'ère du numérique (4). Birgitta Jónsdóttir, cofondatrice du parti, a mené celui-ci à sa conquête de 3 sièges. Élue sous l'ex-formation Mouvement des citoyens en 2009, elle a, entre autres, participé à l'élaboration de l'International Modern Media Initiative, un texte visant à faire de l'Islande un « paradis informationnel (5) ». Elle s'est également fait connaître à l'international par l'affaire Wikileaks. L'administration américaine avait alors sommé Twitter de lui fournir les informations personnelles de la députée, afin de corroborer son lien au site controversé (6).
Le Parti pirate islandais n'est pas le seul en son genre, car 70 autres formations éponymes existent à travers le monde. En 2009, le Parti pirate suédois a décroché un siège au Parlement européen (7). Son équivalent allemand a également été très actif et a pu accéder à des Parlements régionaux. Toutefois, celui d'Islande est le premier à s'amarrer à un Parlement national.
À l'instar de ses homologues européens, le Parti pirate islandais s'inspire du mouvement né en
Suède et défend la libre circulation de l'information sur internet, la transparence de la vie politique et des institutions ainsi que le renforcement de la protection des utilisateurs internet (8). Pour plusieurs, la formation n'est qu'un parti contestataire et ils croient qu'il s'essoufflera; d'autres y voient un renouveau dont l'attrait populaire n'est pas à négliger (9). Les questions dont le parti traite sont en harmonie avec la société moderne et semblent plaire à un électorat encore secoué par la crise bancaire de 2008. En ce sens, Píratar est une alternative intéressante pour ceux et celles qui désirent mettre le cap sur de nouveaux horizons.