Des élections législatives ont eu lieu le 12 septembre dernier en
Norvège, le pays où l'on vit le mieux au monde selon l'Organisation des Nations unies. On estime à 3,4 millions le nombre de Norvégiens qui ont le droit d'élire les nouveaux membres du Storting, le Parlement norvégien.
C'est la coalition rouge et verte, composée du Parti
travailliste norvégien, du Parti gauche socialiste et du Parti du centre, qui a remporté cette élection face à l'ancien
gouvernement qui était formé de l'alliance démocrate-chrétienne composée par le parti Conservateur et par le Parti populaire chrétien.
Le bilan économique de l'ancien
gouvernement démocrate-chrétien de Kjell Magne Bondevik est impressionnant. Malgré cela, les Norvégiens ont préféré les politiques sociales proposées par la coalition rouge et verte. De plus, la participation de la
Norvège dans l'offensive américaine contre l'
Irak semble avoir pesé dans la balance. Jens Stoltenberg, du Parti
travailliste, sera très probablement le
premier ministre du nouveau
gouvernement mais il n'entrera en fonction qu'au mois d'octobre.
La
Norvège, qui est une
monarchie constitutionnelle avec un système
parlementaire, a adopté un système de représentation proportionnelle qui permet de répartir les sièges, sans aucune distorsion, selon le pourcentage de votes obtenus. Par exemple, la coalition rouge et verte, qui a obtenu 48 % des suffrages, obtiendra 48 % des sièges du nouveau Storting. Ce système oblige les partis à former des alliances pour obtenir des majorités plus fortes et ainsi obtenir la légitimité pour gouverner.
L'Alliance démocrate-chrétienne, le dirigeant de l'ancien
gouvernement, s'est présentée devant les électeurs avec un bilan enviable : peu de chômage (3,7 %), une inflation presque nulle (1%), des taux d'intérêt particulièrement bas (2%) et une croissance importante (4%). Cette situation économique privilégiée s'explique par l'abondance du pétrole, produit dont la
Norvège est le troisième plus grand exportateur mondial. L'argent du pétrole est conservé dans un système de gestion indépendant du
gouvernement pour financer les retraites. Ce système permet au
gouvernement d'y puiser de l'argent tout en respectant un certain montant maximum à ne pas dépasser. Grâce à lui, le pays dispose actuellement de 152 milliards d'euros d'économie. La montée récente du prix du baril de pétrole a d'ailleurs permis au fonds d'emmagasiner encore plus de recettes ces derniers mois.
Mais le pétrole ne guérit pas tous les maux ; le fossé entre les riches et les pauvres s'accentue d'année en année. Le nombre de personnes vivant sous le seuil de la pauvreté aurait, selon des statistiques nationales, augmenté de 25 % entre 2001 et 2003 et 5,2 % des Norvégiens, soit 235 000 personnes, seraient aujourd'hui en difficultés financières. En réaction à cette situation, les
travaillistes ont concentré leur campagne sur des politiques sociales en promettant de consacrer plus d'argent à l'éducation, la santé et l'aide aux personnes âgées, plutôt que d'accorder des réductions fiscales qui profitent avant tout aux plus riches. Cette stratégie semble avoir porté fruit.
Cette victoire de la coalition rouge et verte reflète selon nous les valeurs sociales-démocrates de la société norvégienne. Le résultat des élections peut aussi être interprété comme étant une réaction populaire contre la volonté de l'ancien
gouvernement de centre-droit de participer activement à la coalition formée par l'administration américaine de George W.
Bush pour renverser le
président irakien Saddam
Hussein. D'ailleurs, le nouveau
gouvernement a déjà donné suite à l'une de ses promesses électorales en annonçant le retrait des troupes norvégiennes d'
Irak.
Le nouveau
gouvernement devra maintenant remplir ses promesses en investissant dans les domaines sociaux. Mais une question subsiste : avec une si grande part du budget qui est déjà destinée à d'autres priorités, le nouveau
gouvernement pourra t-il entreprendre toutes ses nouvelles initiatives sans devoir puiser des montants additionnels dans le fond spécial du pétrole qui sert à financer les retraites ? D'autres défis attendent cette coalition, à commencer par des
négociations qui devront avoir lieu à l'interne. Par exemple, la gauche socialiste est totalement opposée à une adhésion de la
Norvège à l'Union européenne, alors que les Travaillistes, qui ont beaucoup évolué sur cette question, en envisagent maintenant la possibilité.