Le 11 décembre prochain, les
Chiliens se retrouveront aux urnes pour l'élection d'un nouveau
président, de 120 députés et 20 sénateurs (1). Au
Chili, les votes tournent autour des trois pôles du spectre politique : la droite, le centre et la gauche. Pour chacun de ces pôles, il y a une coalition de partis. À gauche, il y a « le
Pacte ensemble nous pouvons » (Pacto juntos podemos); au
centre gauche nous retrouvons « la Coalition des parties pour la
démocratie » (Concertación de Partidos por la Democracia) et à droite, il y a « l'Alliance pour le
Chili » (
Alianza por Chile) (2). Chacune de ces coalitions est composées de divers partis qui peuvent présenter des candidats à la présidence de façon indépendante.
Il y a présentement quatre candidats dans la course. La favorite selon les sondages, Mme Michelle Bachelet, se présente pour « la Coalition des partis pour la
démocratie » (3). C'est d'ailleurs ce parti qui est au pouvoir depuis la fin de la
dictature du général Augusto
Pinochet en 1990. Mme Bachelet est présentement en position de force dans les sondages pour plusieurs raisons. D'abord, elle fait partie de ceux que l'on appelle les « Anti-
Pinochet » et rejoint une bonne part de la population par cette position. Ensuite, lors du 30e anniversaire du coup d'État du général
Pinochet, elle a bénéficié d'une grande visibilité médiatique en raison de son passé et de celui de son père. En effet, lors de la prise de pouvoir du général
Pinochet, en 1973, le père de Mme Bachelet, qui était général dans l'aviation, a été enlevé, torturé et est mort des suites des mauvais traitements qu'il a subit. De plus, la mère de Mme Bachelet et elle-même furent contraintes de s'exiler peut après car elles furent également victimes de mauvais traitements (6).
En ce qui concerne la coalition de droite, « l'Alliance pour le
Chili », il y a deux candidats en lice. Le premier est M. Sebastián Piñera, un riche homme d'affaire qui possède entre autre la compagnie aérienne chilienne LAN et siège au conseil d'administration de plusieurs autres grandes entreprises chiliennes. Il détient une maîtrise et un doctorat en économie de l'université Harvard.
Le second candidat est M. Joaquín Lavín qui a été élu maire de Las Condes à deux reprises et s'était présenté contre le
président sortant, M. Ricardo Lagos, en 1999 (4). Il détient un diplôme en économie à l'université de Chicago et il faisait également parti du comité d'expert qui a transformé l'économie du
Chili sous le Général
Pinochet.
En ce qui concerne le parti d'
extrême gauche, « le
Pacte ensemble nous pouvons », il n'y a qu'un seul candidat. Il s'agit de M. Tomas Hirsh qui, lors des
présidentielles de 1999, a remporté 0,5% des suffrages (5). Il est l'un des fondateurs du parti Humaniste qui fut le premier parti, en 1987, à être légalisé sous la
dictature. Ensuite, il fut
ambassadeur du
Chili en
Nouvelle-Zélande de 1990 à 1992 et, finalement, cofondateur de « la Coalition des parties pour la
démocratie » qui est au pouvoir depuis 1990(7).
Le système électoral chilien prévoit deux tours de scrutin pour l'élection du
président. Cependant, il est possible d'accéder à la présidence au premier tour en récoltant 50% plus un vote au premier tour. Avant l'arrivée de M. Piñera dans la course, les sondages indiquaient que Mme Bachelet pourrait l'emporter au premier tour. Les sondages favorisent toujours celle-ci mais, selon les mêmes sondages, elle devra attendre le deuxième tour avant de l'emporter (8).
L'enjeu principal de cette élection, qui est également l'élément qui pourrait en faire un moment historique, est le fait que la candidate vedette soit une femme, monoparentale et favorable au divorce. Ce serait la première femme à accéder à ce poste au
Chili. Traditionnellement, la société chilienne est relativement
conservatrice. Pour en témoigner, le droit au divorce fut finalement accepté en 2003 au terme de neuf ans de
négociations. Cela fait du
Chili le dernier pays d'Amérique et l'un des derniers au monde à adopter une telle législation (9). Cet événement a également soulevé de grands débats populaires et demeure un sujet très sensible. Nous verrons donc, au cours des mois de décembre et janvier, si la population chilienne est prête à faire fi de ces éléments et à élire Mme Bachelet, une femme chaleureuse et charismatique, qui possède actuellement un nette avance dans les sondages (10).