Élection en Italie d'un gouvernement dirigé par Silvio Berlusconi
Texte rédigé par l'équipe de Perspective monde

Silvio Berlusconi
Lors des élections législatives en Italie, la droite rafle une majorité de sièges à la Chambre des députés. Cette victoire permet à Silvio Berlusconi, l'ancien président du Conseil, de reprendre les rênes du pouvoir qu'il avait perdu en 2006 au profit d'une coalition de gauche dirigée par Romano Prodi.
Résultats du scrutin
Lors des législatives d'avril 2006, le gouvernement de Silvio Berlusconi a perdu le pouvoir à l'Unione, une coalition de partis de gauche dirigée par Romano Prodi. Ce dernier peine à former un gouvernement qui réussisse à satisfaire l'ensemble des membres de la coalition. De plus, la gauche ne détient qu'une très faible majorité au Sénat, une chambre dont le contrôle est indispensable en Italie pour gouverner avec des coudées franches. Rapidement, le gouvernement Prodi est aux prises avec des conflits internes qui rendent la coalition vulnérable. Au début de 2008, un vote de confiance rejeté par quelques voix au Sénat le contraint de démissionner. Le président de la République, Giorgio Napolitano, tente sans succès de former un nouveau gouvernement. L'impasse devant laquelle le Parlement se retrouve entraîne le déclenchement de nouvelles élections. La campagne électorale est dominée par Berlusconi et l'ex-maire de Rome, Walter Veltroni, tous deux chefs de partis nouvellement constitués. Berlusconi, le leader de l'opposition de droite, dirige le parti Peuple de la liberté (PDL). Quant à Veltroni, il est à la tête du Parti démocrate (PD), une formation de centre gauche. La droite remporte une majorité absolue de sièges, tant à la Chambre des députés (344 sur 630) qu'au Sénat (174 sur 315). Berlusconi, qui prend la tête d'une coalition restreinte, accède au pouvoir pour la troisième fois. Faisant allusion aux nombreux gouvernements éphémères qui se succèdent en Italie, il se dit ouvert à travailler avec l'opposition pour effectuer des réformes constitutionnelles visant une plus grande stabilité. Enfin, l'issue du scrutin confirme le recul des petites formations au profit des deux grands partis nationaux.
Dans les médias...
Marc Lazar, « Pourquoi la droite s'impose-t-elle en Europe ? »
«...Plus profondément surtout, la popularité de Berlusconi reste solidement ancrée dans les profondeurs du pays. Le berlusconisme est une forme d'hégémonie culturelle reposant sur un corpus plus ou moins cohérent de propositions et de valeurs, articulé sur un bloc social comportant deux principaux piliers (pour simplifier, d'un côté, les petits entrepreneurs du Nord, les professions libérales, les commerçants et artisans, et, de l'autre, les gens faiblement instruits et apeurés par les processus de globalisation, d'européanisation et l'arrivée des émigrés). Le scrutin d'avril 2008 marque sans doute une rupture importante dans l'histoire italienne (évolution vers un système bipartisan, disparition du Parlement de plusieurs petits partis, dont les formations de la gauche radicale, apaisement relatif du climat politique entre les principaux protagonistes, prise de conscience des élites de la gravité de la situation de la péninsule, etc.) En même temps, il témoigne de l'évolution politique plus générale de l'Europe. (...) En effet, en un an, sur les dix élections politiques générales qui se sont déroulées dans l'Union européenne, seule l'Espagne a redonné un mandat aux socialistes. Partout ailleurs, la gauche a échoué à déloger la droite du pouvoir. »
Esprit (France), juin 2008, p. 195.
Jean-Jacques Bozonnet, « Le troisième mandat de Silvio Berlusconi en Italie est tiré à droite par la Ligue du Nord »
«...la vraie surprise de ces élections n'est pas le retour triomphal de Silvio Berlusconi, largement annoncé par les sondages dès la chute du gouvernement Prodi, le 24 janvier. La nouveauté réside dans la métamorphose du paysage politique. Seulement cinq partis nationaux seront représentés dans le prochain Parlement contre une bonne trentaine lors de la précédente législature : le PDL et la Ligue du Nord à droite; le Parti démocrate et l'IDV au centre gauche; enfin, l'Union du centre (UDC, démocrate chrétien) qui maintient ses scores habituels (5,6 % et 5,7 %). Elle aura 36 députés et 3 sénateurs. Pour la première fois depuis la naissance de la République italienne, socialistes, communistes et Verts sont portés disparus au Parlement, où seules les petites formations régionalistes du Trentin Haut-Adige et de la Vallée d'Aoste récupèrent quelques miettes (trois députés et huit sénateurs). Le responsable de ce « massacre des nanetti » (petits nains) s'appelle Walter Veltroni. La décision du secrétaire du Parti démocrate de partir seul (ou presque) aux urnes, sans les encombrants alliés de l'ex-coalition Prodi, a précipité la simplification de la carte politique. L'Italie s'est mise en situation de bipolarisation; il reste à graver dans la loi le nouvel échiquier sorti des urnes. »
Le Monde (France), 16 avril 2008, p. 8.
Thierry Oberle, « Inusable conquérant, Il Cavaliere séduit toujours la péninsule »
«...Insubmersible, Silvio Berlusconi a survécu aux magistrats, à de piètres résultats économiques, au pilonnage de la gauche et même au ridicule. Il revient aujourd'hui grâce à sa pugnacité mais aussi à la faveur d'une domination sans partage sur la droite. Berlusconi n'a pas de dauphin dans son propre camp. Gianfranco Fini se contente d'un second rôle et Pier Ferdinando Casini fait désormais bande à part à la tête du petit parti centriste, l'UDC. Seul maître à bord, il a compris que, s'il voulait à nouveau gagner, il devait, cette fois, cesser de promettre la lune. Modeste, il prévoit des « mesures impopulaires » pour sortir le pays du marasme. On le dit usé. Son rival, Veltroni, insiste sur son âge, mais son opiniâtreté et son énergie sont intactes. Il séduit toujours les foules qui s'identifient à lui ou les téléspectateurs volatils conquis par ses mots simples. »
Le Figaro (France), 15 avril 2008, p. 8.
Serge Truffaut, « Immobile Italie »
«...si on en croit les sondages, Berlusconi bénéficie actuellement d'une avance que Petroni ne peut pas combler, à moins d'un miracle. Il va donc probablement être reporté au pouvoir. En compagnie de qui ? Mis à part les démocrates de droite, il faut souligner qu'à ses côtés, il y a et il y aura les nostalgiques de Mussolini, les ténors de l'extrême droite, les Le Pen de la péninsule. Le pire, c'est que cette présence de fascistes camouflant derrière leurs cravates leurs volontés brunâtres va passer comme une lettre à la poste. On se souviendra qu'étrangement, les Européens ont excusé les Italiens alors qu'ils avaient contesté avec force et avec raison la présence de l'extrême droite autrichienne de Jörg Haider, qui avait pourtant inspiré les xénophobes de la Ligue du Nord, alliée de Berlusconi. Désespérant ! »
Le Devoir (Québec, Canada), 3 avril 2008, p. A6.
Éditorial, « Mr. Berlusconi's comeback »
«...His victory owes little to his past, shockingly meager achievements in office. At a time when Italy is enveloped in economic and political gloom, he won with promises of a painless path to renewed prosperity. With the remnants of the departing center-left coalition offering austerity and sobriety and Mr. Berlusconi proposing tax cuts and good times, it was really no contest. The billionaire owner of media and sports businesses also got a major boost from his unsettling partnership with the populist, immigrant-bashing Northern League. (...) What the country desperately needs is a sustained attack on tax evasion, unjustified public subsidies, over-regulation and a deeply ingrained culture of political and business corruption. That may be a lot to ask from a man whose private business dealings have repeatedly drawn prosecutors' attention but no convictions. Mr. Berlusconi's first two terms were disappointingly weak on reform. Italy needs him to do better this time. »
New York Times (États-Unis), 16 avril 2008.
Gouvernance et gouvernement [ 14 avril 2008 ]
Pays | Niveau de démocratie | Chef de l'État | Chef du gouvernement |
---|---|---|---|
![]() | Élevé | Giorgio Napolitano | Silvio Berlusconi |
Les informations précédentes renvoient précisement à la date de l'événement. Le niveau de démocratie est établi à partir des travaux de l'équipe de Polity IV. L'indice renvoie à la démocratie institutionnelle. Les noms des gouvernants sont établis à partir de nos bases de données les plus récentes. Là où on ne trouve aucun nom pour chef du gouvernement, il faut conclure que le chef de l'État est aussi, et sans intermédiaire, le chef du gouvernement, ce qui est le cas des systèmes présidentiels classiques (les États-Unis par exemple).