11 mai 2025

24 janvier 2017

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L'Islande : un modèle de parité des sexes

Bien que l'Islande soit un pays qui est au sommet du classement concernant les droits des femmes, certaines inégalités persistent et continuent d'attiser le mécontentement dans la société islandaise. Depuis 1970, les femmes de cette petite île de 320 000 habitants ont su prendre la rue pour démontrer leur mécontentement face aux inégalités salariales (1). La plus importante de ces manifestations a eu lieu le 24 octobre 1975. À cette occasion, 25 000 femmes, soit 1/5e des femmes en Islande, ont pris la rue, et ont refusé d'aller travailler et même de faire des tâches ménagères. Ce gel de leurs activités quotidiennes avait pour effet de démontrer leur importance capitale à la société (2).

Une force ouvrière partiellement bénévole

Après 41 ans, des inégalités subsistent en Islande. Même si le pays se classe au premier rang du Forum économique mondial en matière d'équité hommes-femmes (3), la parité n'est pas encore parfaite et certaines lacunes sont encore présentes sur le marché du travail. Les femmes islandaises connaissent en moyenne une différence de paie de 17 %, comparativement à leurs homologues masculins (4).

Cet écart assez substantiel les pousse à prendre la rue à nouveau le 24 octobre 2016, une date rappelant symboliquement la grande manifestation de 1975. Toutefois, contrairement à 1975, les femmes refusent tout simplement de rentrer au travail et de participer à leurs tâches au foyer. Prenant en compte leur différence de paie de 17 %, celles-ci coupent leur journée de travail du même pourcentage. Donc, les femmes islandaises quittent le travail le 24 octobre 2016, à 14h38 (5), ce qui symbolise une coupe de 17 % dans une journée de travail de 8 heures et représente l'heure où elles commencent à travailler bénévolement comparativement aux hommes.

Il est important de mentionner que des manifestations similaires ont eu lieu en 2005 et en 2008. Les femmes ont alors quitté le travail respectivement à 14h08 et 14h38 (6). Les heures d'arrêt de travail sont calculées selon le niveau d'inégalité salariale sur le marché du travail, ce qui veut dire qu'en 11 ans, seulement une amélioration marginale a été observée, repoussant l'heure d'arrêt de travail de 30 minutes.

La parité homme-femme : seulement en 2068

Les femmes sont une partie importante de la population active d'Islande et on remarque que la plupart des secteurs économiques présentent encore de nombreuses inégalités très claires. Selon la journaliste Noreena Hertz, seulement 22 % des postes administratifs en Islande, 30 % des experts télévisés et 41 % des sièges au Parlement sont occupés par des femmes, ce qui est un écart assez substantiel (7). De plus, lorsque l'on parle égalité, on ne parle pas seulement des femmes et de l'équité salariale. On remarque que bien que les femmes aient accès aux emplois majoritairement « masculins », les hommes, eux, n'entrent pas réellement dans les domaines traditionnellement « féminins ». Ce qui fait en sorte que la compétition dans les milieux dits « masculins » est plus forte. Cette disproportion vient aussi du fait que dans les milieux « masculin » les paies sont généralement plus élevées (8).

À la vitesse à laquelle avance cette lutte contre les inégalités, on prévoit que la parité totale ne sera pas atteinte avant 2068 (9). Ce qui est évidemment un délai que la plupart des femmes islandaises ne sont pas prêtes à attendre. Les Islandaises espèrent donc une action rapide et efficace de la part du gouvernement et des gestionnaires.

La Commission européenne publie aussi une liste de 26 pays qui montre à partir de quelle heure leurs femmes travaillent gratuitement comparativement aux hommes ayant le même emploi. Cette liste montre notamment que les Coréennes travaillent gratuitement à partir de 10h48, jusqu'aux Espagnoles avec 15h59 (10). Une chose est claire, les inégalités salariales restent ancrées dans la société islandaise et les femmes demandent un changement.




Références:

1. HERTZ, Noreena, Why Iceland is the best place in the world to be a woman, The Guardian, 24 octobre 2016, https://www.theguardian.com/lifeandstyle/2016/oct/... page consultée le 21 janvier 2017

2. Ibid.

3. GULLY, Hélène, Islande : première sur l'égalité des genres, mais « rien n'est acquis », Libération, 31 janvier 2016, http://www.liberation.fr/planete/2016/01/31/island... page consultée le 21 janvier 2017

World Economic Forum, Economies – Iceland, http://reports.weforum.org/global-gender-gap-repor... page consultée le 21 janvier 2016

4. RANC, Agathe, Égalité hommes – femmes : ce que les Islandaises ont à nous apprendre, L'OBS, 25 octobre 2016 http://nouveau.eureka.cc.ezproxy.usherbrooke.ca/Se... page consultée le 21 janvier 2017

5. DEBORDE, Juliette, Inégalités salariales : à quelle heure les femmes arrêtent-elles d'être payées?, Libération, 26 octobre 2016 http://www.liberation.fr/planete/2016/10/26/inegal... page consultée le 21 janvier 2017

6 Ibid.

7. HERTZ, Noreena, op. cit.

8. GULLY. Hélène, op. cit.

9. Le Monde, Pourquoi les Islandaises ont arrêté de travailler à 14h38 lundi, Le Monde Europe, 26 octobre 2016, http://www.lemonde.fr/europe/article/2016/10/24/po... page consultée le 21 janvier 2017

10. DEBORDE, Juliette, op. cit.

Dernière modification: 2017-01-30 07:51:14

-N.D.L.R.: Il est possible que des hyperliens actifs au moment de la recherche et de la rédaction de cet article ne le soient plus ultérieurement.

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