2 avril 2025

10 octobre 2023

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Chaleur historique à Shanghai : les effets dévastateurs des changements climatiques

Selon l’Organisation des Nations unies, l’impact combiné du phénomène météorologique El Nino et des gaz à effet de serre aura pour conséquence d’engendrer des chaleurs jamais répertoriées auparavant pour la période 2023-2027 (1). Le 29 mai 2023, Shanghai enregistre la journée la plus chaude depuis plus d’un siècle observée au mois de mai. Cette ville chinoise fait face à plusieurs obstacles dus aux changements climatiques, notamment la manifestation de la montée des eaux (2).

Un record attribuable à l’activité humaine

En cette fin du mois de mai, la température enregistrée à la station de métro Xujiahui atteint les 36,7 °C. Les résidents de la ville de Shanghai ont senti les effets de cette chaleur intense en début d’après-midi, avec certaines applications météorologiques indiquant une température ressentie de plus de 40 °C. Ce nouveau record surpasse d’un degré le précédent qui avait été établi à quatre reprises, soit en 1876, 1903, 1915 et 2018 (3).

Une étude de l’initiative World Weather Attribution (WWA) publiée à la mi-mai avait fait état de la situation des canicules extrêmes en Asie. Les 22 climatologues sont venus à la conclusion que les changements climatiques avaient augmenté de 30 % les probabilités de pareilles conditions dans certains pays de cette région du globe (4). La WWA attribue un tel record de chaleur à l’activité humaine, plus précisément à la consommation de combustibles fossiles, ayant considérablement perturbé le climat terrestre (5). Depuis 2005, on note une hausse continuelle des anomalies de températures et de précipitation à Shanghai (6).

Une vulnérabilité intrinsèque dans une métropole en évolution

La localisation de la ville rend son territoire intrinsèquement vulnérable à la montée des eaux. Située dans une zone de faible altitude, près de l’embouchure du fleuve Yangtsé, elle est exposée de manière importante aux fluctuations du niveau de la mer (7). Le réchauffement climatique a un impact direct sur les zones côtières de la Chine. En effet, l’évolution croissante de la température moyenne mondiale précipite la fonte des calottes glaciaires, ayant pour conséquence l’augmentation du niveau de la mer (8).

L’urbanisation rapide de la ville aggrave également le risque lié à la montée du niveau de la mer. En raison de l’importante densité de bâtiments ainsi que de l’exploitation excessive des eaux souterraines, la capacité de support de ses sols est réduite et l’enfoncement des terres est accéléré (9). Bien que le taux d’affaissement de Shanghai se soit stabilisé depuis 2010, la ville a subi un affaissement foncier moyen d’environ 23 millimètres (mm) par an entre 1921 et 2007 (10).

Par ailleurs, le niveau le plus élevé de la mer le long des côtes chinoises a été enregistré en 2022. Le ministère des Ressources naturelles révèle qu’il se trouvait supérieur à la normale de 94 mm. Cette élévation a exacerbé les effets des tempêtes et a également été responsable de graves inondations côtières, entraînant du même coup d’importantes pertes économiques (11). Les facteurs, tels que l’expansion thermique des océans, la fonte des glaciers et la désintégration de la calotte glaciaire de l’Antarctique, devraient accélérer cette montée, multipliant ainsi le risque de débordements.

Par rapport à 2010, certains experts estiment que les défaillances des digues et les zones submergées par les crues augmenteront d’environ 30 % et 50 % respectivement d’ici à 2100 (12). En l’absence de mesures d’adaptation rapides, la ville du delta pourrait être confrontée à des inondations catastrophiques d’ici la fin du siècle. Dans cette optique, les experts révèlent également que 62 % de la superficie totale de la ville pourrait être noyée, avec une profondeur d’inondation moyenne de 1,2 mètre (13).

Vers la neutralité carbone d’ici 2060

Au fil des décennies, la Chine a considérablement renforcé ses engagements en matière de changement climatique. Son dernier objectif le plus audacieux, annoncé en 2020, vise à atteindre la neutralité carbone d’ici 2060. La Chine s’est également engagée à réaliser des pics d’émissions de carbone d’ici 2030. Elle a soumis des objectifs plus ambitieux intégrés dans ses contributions déterminées sur le plan national, conformément à l’Accord de Paris (14). Ces objectifs sont également incorporés dans les plans quinquennaux de la Chine, correspondant à une série d’initiatives de développement social et économique. Elle est aussi soutenue par des politiques spécifiques, telles que le Plan d’action pour le pic du dioxyde de carbone avant 2030 et le Working Guidance for Carbon Dioxide Peaking and Carbon Neutrality (15).

Pour atteindre ces objectifs climatiques ambitieux, la Chine met en œuvre diverses mesures, notamment l’expansion des installations solaires et éoliennes. Effectivement, le pays a pour but de développer une capacité combinée de 2 milliards de kilowatts en énergie d’ici 2030. D’ici la même année, il souhaite aussi accroître de 25 % sa part de consommation totale d’énergies renouvelables, représentant une hausse significative par rapport à la dernière décennie.

En parallèle, la Chine prévoit accroître la capacité du puits de CO2 en gonflant sa couverture forestière de 6 milliards de mètres cubes (16). Elle encourage aussi activement l’adoption de véhicules électriques dans de nombreuses villes. Cette méthode montre à ce jour certains résultats avec une augmentation d’environ 11 % des ventes en 2020. Les autorités chinoises travaillent également sur l’établissement d’un système national d’échange de droits d’émission. Cet outil vise à responsabiliser les pollueurs en les obligeant à compenser les dommages environnementaux qu’ils causent (17).

En août 2023, le président Xi Jinping a réaffirmé la détermination de la Chine à définir indépendamment son ordre du jour et ses objectifs en matière de lutte contre le changement climatique, excluant toute interférence extérieure (18). Il reste à voir si le pays peut réellement faire cavalier seul afin de contrer les défis qu’engendrent les changements climatiques sur son territoire.

Médiagraphie

(1) Le Point, « Shanghai enregistre la journée de mai la plus chaude depuis 100 ans », 29 mai 2023, URL [hyperlien] consulté le 08/10/2023

(2) Agence France-presse, « Shanghai enregistre la journée de mai la plus chaude depuis 100 ans », 29 mai 2023, URL [hyperlien] consulté le le 08/10/2023

(3) Franceinfo avec AFP, « Climat : Shanghai enregistre la journée de mai la plus chaude depuis 100 ans », 29 mai 2023, URL [hyperlien] consulté le le 08/10/2023

(4) Agence France-presse, op.cit.

(5) World Weather Attribution, Extreme heat in North America, Europe and China in July 2023 made much more likelyby climate change, 25 juillet 2023, URL [hyperlien] consulté le 08/10/2023

(6) Meteoblue, Climate change Shanghai, 2022, URL [hyperlien] consulté le 08/10/2023

(7) SHEN, Rujun, « Shanghai highrises could worsen threat of rising seas », Reuters, 5 octobre 2008, URL [hyperlien] consulté le 08/10/2023

(8) CHIH-YIN LAI, Elisa, « Climate change impacts on China’s Environment : biophysical impacts », Wilson Center, février 2009, URL [hyperlien] consulté le 08/10/2023

(9) Ibid.

(10) YIN, Jie, YU, Dapeng, « Rising sea levels could swamp sinking Shanghai », Down to Earth, 16 mai 2023, URL [hyperlien] consulté le 08/10/2023

(11) GAN, Nectar, « Record rise in China’s sea levels threatens coastal cities like Shanghai », 13 avril 2023, URL [hyperlien] consulté le 08/10/2023

(12) YIN, Jie, YU, Dapeng, op.cit.

(13) Ibid.

(14) ANDERSON, Kara, « China : Driving climate solutions or problems », Greenly, 4 octobre 2023, URL [hyperlien] consulté le 08/10/2023

(15) Ibid.

(16) Ibid.

(17) Ibid.

(18) YIN, Jie, YU, Dapeng, op.cit.



Dernière modification: 2023-10-16 14:48:51

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Noémie Gravel
analyste en formation,
École de politique appliquée,
Faculté des lettres et sciences humaines,
Université de Sherbrooke

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