12 mai 2025

Rainier III, (Monaco) | 1923-2005

  • Né Rainier Louis Henri Maxence Bertrand Grimaldi le 31 mai 1923 à Monaco
  • Prince héréditaire de Monaco (31 mai 1944 – 9 mai 1949)
  • Prince de Monaco (9 mai 1949 – 6 avril 2005)
  • Décédé le 6 avril 2005 à Monaco
  • Joëlle Meskens, « Monaco pleure son prince chagrin », Le Soir (Belgique), 7 avril 2005.

    «...La vie de Rainier, ce drôle de prince qui régna longtemps sur une monarchie de droit divin (ce n'est qu'en 1962 que Monaco fut doté d'une Constitution) est un roman. Fait de rêve et de paillettes, notamment. Photo-souvenir surannée de son accession au pouvoir. Accoudé à son balcon de marbre, un jeune homme se recueille devant l'horizon. Il pourrait cueillir Monte-Carlo avec ses gazons d'angélique, ses palais d'amandes douces, ou ce gros rocher praliné qui porte sur le dos sa capitale friandise. Le visage rose et rond pourrait convenir à un banquier, à un capitaine de rugby autant qu'au dernier des Grimaldi, écrit « Le Monde » en 1949 lorsqu'à 26 ans seulement, il succède à son grand-père Louis II dont la fille, Charlotte, avait renoncé au trône. Quelle verve ! La légende a consacré l'histoire de ce prince qui importa Hollywood en Méditerranée en épousant Grace Kelly un an après l'avoir rencontrée au festival de Cannes. Le mariage, en 1956, fit les premiers beaux jours de l'Eurovision et le bonheur de millions de téléspectateurs scotchés à l'écran pour compter les têtes couronnées. Mais l'heureux époux demeura toujours inconsolable lorsque la belle américaine se tua en 1982 dans un accident de voiture après lui avoir donné trois enfants. »

    Philippe Jérôme, « Il a régné durant un demi-siècle », L’Humanité (France), 7 avril 2005, p. 10.

    «...Opposant dans un premier temps au traité de Maastricht, Rainier III avait opportunément saisi l'occasion que fut la création de l'euro pour s'affranchir un peu plus de la tutelle française. Symboliquement, en faisant en sorte que toute trace de la République disparaisse des pièces monégasques. Politiquement, en posant la candidature de la Principauté au Conseil de l'Europe. Une stratégie qui, sous le gouvernement Jospin, aggrava les tensions entre la France, son paradis fiscal et celui qui en avait les clés depuis un demi-siècle. Homme plutôt affable aux cheveux prématurément blanchis, Rainier Grimaldi inspirait le respect. Sa disparition, qui ne changera pas la face du monde, suscite une émotion non feinte des Monégasques et de ceux qui ont connu dans sa jeunesse ce bon vivant amateur de truffes noires, ce collectionneur démentiel de voitures anciennes, ce fou de football et de trapèze volant qui a vécu sur un grand pied grâce au filet protecteur de la France. Mais qui, au sein du carnaval planétaire, se sentait politiquement à l'étroit à la tête de son État confetti. »

    Patrice de Méritens, « Il était une fois en prince...», Le Figaro (France), 9 avril 2005, p. 44-45.

    «...Si officiellement on appelle Rainier le « prince souverain », officieusement, c'est plutôt le « patron ». Une appellation, observent les commentateurs, qui s'explique par le fait que Monaco est géré comme une entreprise et qu'on devrait plus y parler de chiffre d'affaires que de produit intérieur brut. Béton, banques, jackpot, paradis du jeu et des affaires, nous voici loin de la principauté d'opérette des années 50. Avec un prince qui décide de tout. Même de faire reculer ses frontières. Espace vital oblige. En un demi-siècle, Rainier a accru son territoire de 20 %, conquérant 34 hectares sur la Méditerranée. « Homme libre, toujours tu chériras la mer », dit le poète. Rainier restera dans l'histoire de son peuple comme celui qui l'a dominée. »

    Luc Debraine, « Rainier III, le prince qui avait compris le pouvoir des images », Le Temps (Suisse), 7 avril 2005.

    «...Rainier III a compris le pouvoir des images. En janvier 1957, à la naissance du premier enfant du couple, le palais met aux enchères des photos exclusives de Caroline. Paris-Match et France Soir, alors premier quotidien national, se battent pour obtenir les clichés. France Soir l'emportera, contre une forte somme. Un système promotionnel unique, véritable construction médiatique, est lancé. Certes, devenu incontrôlable, la machine à rêves finira par se retourner contre ses initiateurs, vite aussi épiés que les Windsor, voire davantage. Les membres de la famille Grimaldi seront contraints d'aller devant les tribunaux pour protéger leur «vie privée», et accessoirement obtenir d'intéressants dommages et intérêts (1 million de francs suisses en faveur de Stéphanie pour les seules années 1999 et 2000). A la source même du plan marketing de la famille princière, les paparazzi ne sont depuis longtemps plus les bienvenus sur le piton fortifié. Reste l'essentiel: la médiatisation habile d'un mariage-conte de fées a été le levier qui a soulevé le Rocher, lui donnant une visibilité planétaire. Attirés par tant de lumières scintillantes, tant de stars et de strass, les riches, les puissants et les vedettes ont rallié la Principauté, qui n'a pas tardé à s'étendre sur la mer, à accueillir de multiples investisseurs, les transparents comme les opaques. L'absence de délit fiscal et d'impôt sur le revenu, le secret bancaire, la sécurité quasi orwellienne des personnes ont fait le reste, c'est-à-dire l'essentiel de la métamorphose par le «boss» d'un terne confetti en entreprise luxuriante. »

    Richard Severo, « Rainier, 81, transformed Monaco », International Herald Tribune (Royaume-Uni), 7 avril 2005, p. 1.

    «...within a decade Rainier formed two fortunate alliances, one personal and one professional. He married Kelly, a reigning member of Hollywood royalty, in a whirlwind romance that put his principality on the map. And he acquired the much-needed financial support of one of the world's richest men, the Greek shipping magnate Aristotle Onassis. His investment ultimately helped renew what passed in Monaco for its only natural resource: the fabled gambling casino at Monte Carlo. [...] Rainier seemed an unlikely agent of deliverance. He had spent much of his youth demonstrating his preference for fast cars and beautiful women. But his playboy image was inapt, according to Steven Englund, author of the biography "Grace of Monaco." Englund wrote that the prince was "the opposite of fancy-free in character" and that he was "striving to fill his life" with something of value. Rainier felt strongly that Monaco had a dismal future if it catered only to the super-rich and depended mostly on gambling to sustain itself, as it had since the 19th century. The 19th century's old-money rich had been replaced by the 20th century's new-money captains of industry, and Rainier thought Monaco's future lay with them and with the vast middle class of America and Europe. »