Visite de Deng Xiaoping aux Etats-Unis
Texte rédigé par l'équipe de Perspective monde

Deng Xiaoping
L'établissement officiel de relations diplomatiques entre la République populaire de Chine (RPC) et les États-Unis, le 1er janvier 1979, est suivi de près par la visite que l'homme fort du régime chinois, Deng Xiaoping, effectue aux États-Unis.
Le voyage du président Richard Nixon, en 1972, marque une étape importante dans le rapprochement entre les États-Unis et la RPC. Celui-ci se poursuit sous Gerald Ford, qui se rend en Chine en 1975, et Jimmy Carter, élu en 1976. Cette volonté est également manifeste chez les réformistes ayant succédé à Mao Zedong, décédé en 1976. En 1978, ils adoptent les quatre modernisations - agriculture, industrie, science et technologie, défense - dans le but de faire de leur pays une grande puissance au XXIe siècle. Le 1er janvier 1979, un autre pas décisif est franchi alors que les États-Unis et la RPC établissent des liens diplomatiques officiels. Cela signifie que les Américains reconnaissent le gouvernement de la RPC et qu'ils rompent leurs liens diplomatiques avec la République de Chine dont le gouvernement est à Taïwan depuis 1949. Cette décision est suivie, le 31 janvier, par le début de la visite historique aux États-Unis de Deng Xiaoping, choisi l'homme de l'année 1978 par la revue Time. Cette coopération entre les deux pays est vivement souhaitée par les leaders chinois qui veulent endiguer l'influence soviétique et profiter de leurs liens avec les États-Unis pour développer leur pays économiquement. En plus de rencontrer le président Jimmy Carter, Deng, qui est accompagné d'une imposante délégation, se rend à Atlanta, à Houston ainsi qu'à Seattle où il visite les usines Boeing. Malgré la présence de contestataires, insatisfaits de la rupture avec Taïwan, la présence du leader chinois est généralement bien accueillie. Les relations entre les deux pays continueront d'ailleurs de progresser au cours de l'année avec l'ouverture d'ambassades, la signature d'un traité accordant à la RPC la clause de la nation la plus favorisée (juillet) et le voyage du vice-président Walter Mondale en Chine (août).
Dans les médias...
Raymond Aron, « Le rassemblement antihégémoniste »
«...Deux fois épuré, deux fois revenu au pouvoir, Deng Xiaoping vit aujourd'hui son heure de gloire. Par les accords avec les États-Unis, il consacre et complète la politique que le Parti communiste et le gouvernement de la Chine populaire mènent à l'intérieur. La réhabilitation des victimes de la Révolution culturelle, voire la réhabilitation posthume de l'ancien président Liu Shaoqi, n'est pas moins symbolique que la réconciliation avec le « Tigre de papier ». Une fois la nouvelle vérité proclamée - les quatre modernisations, l'efficacité mise au-dessus de l'idéologie - l'appel au capital et à la technique du Japon et des États-Unis découle logiquement de la voie chinoise. Avantage supplémentaire : entre le Mao des dernières années et le Deng d'aujourd'hui, il subsiste une continuité qui, de quelque manière, dissimule les conversions : l'Union soviétique demeure plus que jamais l'ennemi no 1. »
L'Express (France), 10 février 1979, p. 56.
Farida Arayi, « Un « rouge » à la Maison Blanche »
«...Bien que le pacte anti-soviétique souhaité par Deng soit exclu pour le moment, le voyage du vice-Premier ministre chinois n'est pas seulement une occasion de sceller l'établissement de relations diplomatiques entre son pays et celui du président Carter. C'est aussi l'occasion - attendue par les hommes d'affaires américains comme par les planificateurs chinois - de donner une nouvelle impulsion aux relations économiques et commerciales. Selon Mme Kreps (Juanita M.), secrétaire américain au Commerce, les exportations des États-Unis vers la Chine, qui ont déjà atteint un milliard de dollars (contre 172 millions en 1977), pourraient s'établir à 2 milliards par an au cours des cinq années à venir. Tous les espoirs semblent aujourd'hui permis aux banquiers et industriels américains, qui voient dans la Chine le « marché du siècle ». Reste à savoir si la République populaire a les capacités de financer l'énorme programme d'investissement qu'elle s'est fixé. Sur ce point, nombre de rapports affirment que Pékin ne pourra s'en sortir sans un recours massif aux capitaux étrangers. »
Jeune Afrique (France), 7 février 1979, p. 24.
K.S. Karol, « Les sabots de Deng Xiaoping »
«...Jimmy Carter a imposé un long toast, un peu extravagant, dans lequel il a rappelé que les États-Unis étaient nés, eux aussi, d' « une révolution pour la liberté » et déclaré, à la fin, qu'il souhaitait « une Chine forte qui vit en sécurité ». Pour qui connaît l'histoire des rapports entre Washington et la Chine de Mao, ces paroles ont d'abord une résonance paradoxale : quatre présidents américains, de Harry Truman à Lyndon Johnson, ont prétendu ne pas pouvoir reconnaître le gouvernement de Pékin parce qu'il avait été « établi par la violence révolutionnaire et non par la voie légale ». Aujourd'hui, leur successeur, Jimmy Carter, découvre des affinités avec la révolution chinoise dans le passé révolutionnaire de son propre pays. Certes, les temps changent pour tous, les alliances basculent, et Deng Xiaoping n'a pas cru bon de prononcer un seul mot pour rendre hommage à ceux qui avaient payé cher, aux États-Unis, la défense de la révolution chinoise pendant les années noires du maccarthysme. Mais que signifie, au juste, aujourd'hui, la formule cartérienne « une Chine forte qui vit en sécurité » ? »
Le Nouvel Observateur (France), 5 février 1979, p. 5.
Angus Deming et al., « Bearbaiting »
«...Throughout his stay in the U.S., Teng easily lived up to his billing as a shrewd and compelling political leader, and he seemed to tap deep and long-hidden wellsprings of American goodwill toward China. As he signed agreements with Teng on scientific and cultural exchanges, Carter glowingly hailed the « new and irreversible course » that had been established in Chinese-American relations. But America's new honeymoon with China - and its feisty Deputy Prime Minister - carried risks. Peking could change course again in its policy toward the U.S. or Taiwan. The Soviets, out of anger at Teng's new friends, might delay SALT II. And fighting between Vietnam and China could catch the U.S. in a painful diplomatic cross fire. The U.S., as a genuine superpower, does not have China's freedom of action. « The security concerns of the United States do not coincide completely, of course, with those of China, » the President said at the signing ceremony with Teng. « Nor, » he added pointedly, « does China share our responsibilities. » But as he surveyed the triumphs and the promise of Teng's visit, Jimmy Carter plainly felt that all the risks of the new relationship were well worth taking. »
Newsweek (États-Unis), 12 février 1979, p. 27.
Gouvernance et gouvernement [ 31 janvier 1979 ]
Pays | Niveau de démocratie | Chef de l'État | Chef du gouvernement |
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![]() | Faible | Ye Jianying | Hua Guofeng |
Les informations précédentes renvoient précisement à la date de l'événement. Le niveau de démocratie est établi à partir des travaux de l'équipe de Polity IV. L'indice renvoie à la démocratie institutionnelle. Les noms des gouvernants sont établis à partir de nos bases de données les plus récentes. Là où on ne trouve aucun nom pour chef du gouvernement, il faut conclure que le chef de l'État est aussi, et sans intermédiaire, le chef du gouvernement, ce qui est le cas des systèmes présidentiels classiques (les États-Unis par exemple).