9 mai 2025
3 septembre 2004

Dénouement d'une prise d'otages dans une école de Beslan, en Russie

Texte rédigé par l'équipe de Perspective monde


L'école de Beslan

Plus d'un millier de personnes, dont plusieurs centaines d'écoliers, sont pris en otage le 1er septembre 2004 dans une école de Beslan, en Russie. Formé en majorité de Tchétchènes, le groupe qui les retient est presque entièrement exterminé à la suite d'une intervention des forces spéciales russes qui se solde par près de 400 morts.


Pour en savoir plus: Discours du président russe à la suite des événements de Beslan

La prise violente de Grozny, la capitale tchétchène, en février 2000, marque une nouvelle étape dans la lutte de la Russie contre les sécessionnistes. La résistance tchétchène se poursuit tout de même, avec des actions ciblées qui se déroulent notamment à Moscou (EX. la prise d'otages du théâtre de la Doubrovka en octobre 2002). Les attentats s'intensifient en 2004. Le président tchétchène pro-russe Akhmad Kadyrov est assassiné le 9 mai. Il sera remplacé par Alou Alkhanavo après les élections du 29 août. Des attentats sont aussi effectués contre des avions russes et dans le métro de Moscou. Le 1er septembre, profitant d'une « journée de la connaissance » à laquelle les parents sont conviés, un commando d'une trentaine de membres prend plus de 1000 personnes en otage dans une école de Beslan, en Ossétie du Nord, en Russie. Un porte-parole du groupe, à majorité tchétchène, revendique l'indépendance. Après deux jours de discussions, des forces spéciales russes ceinturant le bâtiment donnent l'assaut à la suite d'une explosion dont l'origine est indéterminée. Les tirs soutenus et les charges d'explosifs posées dans l'école font des dégâts : près de 400 morts, dont 334 écoliers, et tous les preneurs d'otages, sauf un. Le président Vladimir Poutine réitère sa détermination face à ces actions. Dans les semaines qui suivent, plusieurs questions sont toutefois soulevées relativement à la pertinence et à la cohésion de l'assaut des forces russes. Une commission d'enquête du Parlement russe les blanchira en 2006. Malgré le fait que la prise d'otages est revendiquée par Chamil Bassaïev, un chef de guerre tchétchène, de nombreux analystes s'interrogent également sur la justesse d'une foule d'informations, dont le nombre des assaillants, leur provenance et même leurs véritables motivations.

Dans les médias...

Laure Mandeville, « Le soutien unanime de l'Occident à Moscou »

«...Peut-on approfondir la relation stratégique avec Moscou comme la diplomatie française entend le faire, sans être en mesure de poser ouvertement des questions sur une politique caucasienne qui menace de déstabiliser la région bien au-delà des frontières russes ? Peut-on continuer de donner un blanc-seing à Poutine en Tchétchénie, sous prétexte qu'il s'agit d'une « question intérieure » et que « l'intégrité des frontières ne peut être mise en cause » ? En s'en tenant à ces formules de principe, l'Occident fait mine d'oublier que Moscou récolte ce qu'il a semé. C'est ce qu'a rappelé l'ancien président tchétchène Aslan Maskhadov, qui, tout en condamnant la prise d'otages, a souligné les responsabilités de la Russie dans la radicalisation de la guérilla. « La cause de la tragédie de Beslan et de toute la spirale infinie de la violence en Tchétchénie et dans la région, c'est la politique de Poutine dont le régime est coupable de crimes massifs », a-t-il accusé, affirmant qu'« un quart de la population tchétchène, dont 40 000 enfants, a été exterminé durant les dix derniers années. » (...) Le chroniqueur russe Sergueï Parkhomenko était hier sur la même longueur d'onde que Maskhadov, estimant que la « flambée du terrorisme en Russie est née de la ligne... Poutine ». « Le président refuse de voir que ce qui arrivé exige une révision des fondements de la politique intérieure russe », assénait-il. »

Le Figaro (France), 6 septembre 2004, p. 3.

Jean Chatain, « D'une barbarie à l'autre »

«...Cette stratégie de la dissimulation et de l'intox est vivement dénoncée par plusieurs titres de la presse du pays, l'un d'eux qualifiant de « honte nationale » le dénouement de la prise d'otages et accusant les pouvoirs publics d'avoir sciemment entravé le travail des journalistes, avant d'ajouter qu'une partie de ces derniers avaient de toute façon délibérément « négligé les intérêts de la société » par peur de susciter l'ire du pouvoir. Selon Irina Petrovskaïa, éditorialiste du quotidien Izvestia, « si les autorités ont appris quelque chose de la Doubrovka (théâtre de Moscou où une importante prise d'otages a eu lieu en octobre 2002), c'est uniquement à empêcher les journalistes de travailler, à les mettre le plus loin possible de la scène du drame, à donner le moins d'information possible, voire aucune ». Selon la version officielle, les forces spéciales ont été « contraintes » à l'assaut après que deux explosions eurent été entendues vendredi matin à l'intérieur de l'établissement. Une version contredite par les témoignages recueillis à Beslan, dont nombre d'habitants mettent ouvertement en cause lesdites forces spéciales et les accusent d'avoir provoqué le carnage. »

L'Humanité (France), 6 septembre 2004, p. 3.

Jean-Marc Salvet, « La folie barbare »

«...La situation en Tchétchénie est comme une gangrène qui ronge tout le Caucase et, par-delà, la Russie entière. Ce ne sont évidemment pas les contingents militaires russes envoyés sur le front tchétchène depuis des années qui ont permis de trouver une solution politique à cette guerre sanglante qui perdure aux portes de l'Europe, non plus que le scrutin de dimanche dernier. Dans ce dossier, Vladimir Poutine a gravement failli. Sa politique de « normalisation » est un échec lamentable. Mais les assaillants qui ont pris d'innocentes victimes en otage ont-ils cru un seul instant qu'ils serviraient la cause tchétchène en ciblant les élèves d'une école ? Les leaders tchétchènes qui ont désavoué la prise d'otages dès les premières heures avaient bien compris que non. Ce ne sont pas des combattants, mais des barbares aveuglés de haine et ayant perdu tout sens moral qui ont jonché le sol de Beslan de cadavres d'enfants et d'adultes. Cette tragédie envenimera encore davantage des relations interconfessionnelles et interethniques déjà brûlantes dans tout le Caucase. Elle plonge le monde entier dans un terrible effroi. »

Le Soleil (Québec, Canada), 4 septembre 2004, p. D5.

Irina de Chikoff, « La faiblesse de l'homme fort »

«...La « normalisation » de la Tchétchénie se traduit par une accélération des attentats. Chacun sait que les prévenir est la plupart du temps impossible. Mais aucune rodomontade ne peut juguler le chaos. Les Soviétiques ont toujours cru qu'en niant la réalité, ils parviendraient à la changer. Elle s'est vengée. L'URSS a dû s'incliner devant ses propres désastres. Avant la prise d'otages de Beslan, deux attentats se sont succédé sans qu'une « alerte maximale » ne soit décrétée : le 24 août, deux avions russes explosent. Bilan : 90 morts. Le 31 août, une femme kamikaze en se suicidant entraîne 10 personnes dans la mort près d'une station de métro à Moscou. Le lendemain, les terroristes se sont emparés de l'école numéro 1. « Nous avons fait preuve de faiblesse, a dit Vladimir Poutine, les faibles sont toujours battus. » Il ne quittera jamais le costume de l'homme de fer qu'il avait endossé en 1999, lorsque Boris Eltsine l'a désigné comme premier ministre, puis dauphin. Mais le tsar est nu. Le président qui a mis au pas les oligarques, castré la télévision et muselé la presse, ne peut éviter que la population s'interroge sur sa capacité réelle à mettre de l'ordre dans les services dont lui-même est issu, à lutter contre l'incompétence et la corruption qui continuent à régner dans les ministères des « siloviki ». »

Le Figaro (France), 7 septembre 2004, p. 2.

David Brooks, « Cult of Death »

«...Whatever horrors the Russians have perpetrated upon the Chechens, whatever their ineptitude in responding to the attack, the essential nature of this act was in the act itself. It was the fact that a team of human beings could go into a school, live with hundreds of children for a few days, look them in the eyes and hear their cries, and then blow them up. Dissertations will be written about the euphemisms the media used to describe these murderers. They were called « separatists » and « hostage-takers. » Three years after Sept. 11, many are still apparently unable to talk about this evil. They still try to rationalize terror. What drives the terrorists to do this? What are they trying to achieve? They're still victims of the delusion that Paul Berman diagnosed after Sept. 11: « It was the belief that, in the modern world, even the enemies of reason cannot be the enemies of reason. Even the unreasonable must be, in some fashion, reasonable. » This death cult has no reason and is beyond negotiation. This is what makes it so frightening. This is what causes so many to engage in a sort of mental diversion. They don't want to confront this horror. So they rush off in search of more comprehensible things to hate. »

The New York Times (États-Unis), 7 septembre 2004, p. A23.

Gouvernance et gouvernement [ 3 septembre 2004 ]

Pays Niveau de démocratie Chef de l'État Chef du gouvernement
flagRussieIntermédiaireVladimir PoutineMikhaïl Fradkov

Les informations précédentes renvoient précisement à la date de l'événement. Le niveau de démocratie est établi à partir des travaux de l'équipe de Polity IV. L'indice renvoie à la démocratie institutionnelle. Les noms des gouvernants sont établis à partir de nos bases de données les plus récentes. Là où on ne trouve aucun nom pour chef du gouvernement, il faut conclure que le chef de l'État est aussi, et sans intermédiaire, le chef du gouvernement, ce qui est le cas des systèmes présidentiels classiques (les États-Unis par exemple).

Évolution des composantes du système politique

Profil Gouvernants Démocratie Partis politiques
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