3 mai 2025
6 octobre 1981

Assassinat du président égyptien Anouar el-Sadate

Texte rédigé par l'équipe de Perspective monde


Anwar Sadat et Jimmy Carter à Camp David
Jimmy Carter Library Collection

Le président égyptien Anouar el-Sadate est abattu par un commando de fondamentalistes musulmans alors qu'il assiste à un défilé militaire au Caire. Sadate, qui avait succédé à Gamal Abdel Nasser en 1970, était âgé de 62 ans.

L'attitude conciliante de Sadate à l'endroit des Américains et d'Israël lui attire l'hostilité des intégristes musulmans contre qui il a déclenché une sévère répression plus tôt dans l'année. Un complot pour l'exécuter se réalise le 6 octobre 1981 pendant que le président assiste à un défilé militaire commémorant la guerre du Kippour. L'assaut surprise d'un commando de quelques hommes fait quatre morts, dont Sadate, et une trentaine de blessés. Les funérailles du président se déroulent le 10 octobre en présence des ex-présidents américains Richard Nixon, Gerald Ford et Jimmy Carter, du premier ministre israélien Menahem Begin et d'autres leaders politiques influents. Le vice-président Hosni Moubarak, qui était près de Sadate au moment de l'assaut, succède à ce dernier à la présidence. Son choix sera approuvé presque unanimement lors d'une consultation populaire, le 13 octobre. Favorable aux ententes prises par son prédécesseur sur la scène internationale, Moubarak procédera à des épurations au sein de l'armée avant d'adopter une approche plus modérée à l'endroit des intégristes.

Dans les médias...

Mohamed Sid-Ahmed, «L'Égypte réduite au silence»

«.....M. Sadate a invoqué l'article 74 de la Constitution pour incarcérer, au début de septembre, plus de mille cinq cents membres de l'opposition, dont plusieurs de réputation mondiale; (...) Devant le danger que son entreprise de paix ne s'effondre totalement, M. Sadate a pris la décision de s'attaquer à l'ensemble de l'opposition, de droite ou de gauche, modérée ou extrémiste, légale ou clandestine, religieuse ou laïque. Jamais auparavant l'Etat ne s'était attaqué simultanément à un tel éventail de forces. Quand M. Sadate s'en était pris au groupe de M. Ali Sabri, en mai 1971, des marxistes avaient pour la première fois été appelés à des postes ministériels et à la direction de l'Union socialiste arabe afin de mieux isoler le groupe déchu. Désormais, le régime ne peut compter que sur la force de son appareil répressif; et quant aux résultats du référendum, même 99 % de «oui» ne pourraient en aucune manière tenir lieu de consensus propre à remplacer les forces vives de la nation. La répression actuelle, loin d'assurer l'évacuation du Sinaï, peut au contraire compliquer davantage encore la situation, et les Israéliens ne peuvent ignorer ce risque.»

Le Monde diplomatique (France), octobre 1981, p. 1 à 15.

Jean Daniel, «La passion d'Anouar El-Sadate»

«...Sachant que le temps était compté, il fallait faire la preuve qu'un Sadate pouvait réussir sans déshonneur et sans apostasie; que par la paix il pouvait obtenir mille fois plus que par la haine, le refus et la guerre. Alors le monde entier, ouvrant enfin les yeux devant l'irruption du miracle, se serait uni, lors de l'attentat contre son auteur, et on ne pourrait pas dire que seuls, avec les Égyptiens, pleurent Sadate les Occidentaux et les alliés d'Israël. Et pour le successeur du président martyr, la voie serait tracée, droite - inéluctable. Au lieu de quoi, il y a bien des risques que tout finisse par rentrer dans l'ordre des faits «prévisibles et qui peuvent être expliqués par la raison». C'est un ordre bien familier où chacun se sent à l'aise, celui de l'intransigeance et du sectarisme, du fanatisme et de la barbarie. Nous assisterons à la confusion triomphante de la religion et de l'extrémisme, du progressisme et du manichéisme (...) Rien, sans doute, n'est encore joué. Le fait que l'Égypte n'ait pas subi de coup d'État et que l'armée ne se soit pas insurgée laisse encore l'avenir ouvert. Il ne le demeurera pas longtemps, si, partout ailleurs, on ne sait pas interpréter la mort de Sadate comme un véritable testament.»

Le Nouvel Observateur (France), 10 octobre 1981, p. 21.

Mehdi Malek, «À qui profite le crime ?»

«...Il n'en reste pas moins que la disparition du successeur de Nasser arrange de nombreux pays. D'abord Israël, qui aura dorénavant en face de lui un homme ne possédant pas la stature internationale acquise par Sadate. Déjà des voix israéliennes autorisées, au plus haut niveau, remettent en question les accords passés avec le président défunt pour l'évacuation du Sinaï au printemps 1982. Mais aussi les USA, à plus d'un titre. On sait maintenant que le conflit entre le président Reagan et le Congrès à propos de la livraison des AWACS à l'Arabie saoudite n'aura pas lieu, parce que la facilité avec laquelle Sadate, l'homme le plus protégé du monde, a été tué, a montré la fragilité des régimes politiques du Moyen-Orient et le danger de leur livrer un matériel militaire sophistiqué qui pourrait aisément passer dans le camp adverse. Enfin, c'est la cause de la paix au Moyen-Orient qui pourrait profiter de l'élimination de Sadate.»

Jeune Afrique (France), 21 octobre 1981, p. 55.

Christiane Berthiaume, «Au Caire : personne ne pleure la mort de Sadate»

«...La foule ne s'est pas précipitée dehors en apprenant l'assassinat du président Sadate comme il y a onze ans pour la mort naturelle de Nasser. Pourtant, les Cairotes ont l'habitude de sortir dans la rue en pleurant la mort d'un chanteur populaire. Bien sûr, l'état d'urgence, décrété pour un an, interdit tous les rassemblements. Mais il n'y a aucun signe de profond chagrin. Pas de visages tristes. Tout juste des haussements d'épaules. Bref, la disparition du président Sadate cause plus d'émoi à l'étranger que chez lui ! En fait, il faut bien le constater (et c'est surprenant) la popularité du président Sadate était...«made in America». (...) Sadate fut aimé pour avoir fait une chose, «la paix avec Israël. C'est tout. Quant au reste...», entend-on dans la bouche des Égyptiens. Pourtant, l'époque nassérienne avec ses contrôles, ses emprisonnements arbitraires, sa police secrète, sa surveillance, fut dure pour la population. Alors que les dix ans de règne de Sadate ont été marqués par une ouverture, un assouplissement, une tolérance même de l'opposition.»

Le Devoir (Québec, Canada), 9 octobre 1981, p. 1.

S.A., «He Went to Jerusalem»

«...Now Sadat id dead. But, for the moment, that is all. He has not been overthrown by a revolution, or even a coup d'état. The institutions he set up and the men he promoted remain, for the moment, in place. The great question as yet unanswerable, is : how much of his work can be preserved or carried on now that he has gone ? Changes of detail there will surely be, and some of them will be healthy. One hopes they would include an amnesty for all those arrested last month against whom there are no specific charges of crimes of violence. That would enable the new government to start work in a clearer and freer atmosphere, with some hope of broadening its base of support. One must hope, on the other hand, that they would not include an abrogation of the peace treaty with Israel. Glorious or not, this remains vital to Egypt's interests and a beacon of hope for the rest of the world. Leaving aside the longer term questions, Egypt's immediate interest must be to convince the Israelis that peace does not, after all, depend on the life of one man...»

The Times (Royaume-Uni), 7 octobre 1981, p. 17.

Gouvernance et gouvernement [ 6 octobre 1981 ]

Pays Niveau de démocratie Chef de l'État Chef du gouvernement
flagÉgypteFaibleHosni MoubarakHosni Moubarak

Les informations précédentes renvoient précisement à la date de l'événement. Le niveau de démocratie est établi à partir des travaux de l'équipe de Polity IV. L'indice renvoie à la démocratie institutionnelle. Les noms des gouvernants sont établis à partir de nos bases de données les plus récentes. Là où on ne trouve aucun nom pour chef du gouvernement, il faut conclure que le chef de l'État est aussi, et sans intermédiaire, le chef du gouvernement, ce qui est le cas des systèmes présidentiels classiques (les États-Unis par exemple).

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