Intensification d’une guerre commerciale entre les États-Unis et la Chine
Texte rédigé par l'équipe de Perspective monde

Donald Trump
Donnant suite à un de ses engagements électoraux, le président des États-Unis, Donald Trump, accentue la pression commerciale sur la Chine en 2018 en imposant des tarifs douaniers sur une foule de produits importés. Le 15 juin, il annonce que des produits d’une valeur de 50 milliards seront touchés, une décision qui entraîne une réplique chinoise.
Lors de la campagne électorale de 2016, le candidat républicain Donald Trump s’engage à protéger l’industrie américaine en instaurant une politique protectionniste plus agressive. Il veut spécifiquement réduire le déficit commercial avec la Chine ainsi que mettre fin à certaines pratiques de cette dernière qu’il juge « déloyales » (restrictions aux entreprises étrangères, espionnage industriel). En 2017, le déficit commercial avec la Chine se chiffrerait à lui seul à environ 375 milliards de dollars. Au début de 2018, le président américain impose des tarifs sur des produits fabriqués à l’étranger, comme des panneaux solaires et des laveuses, avant de faire de même en mars sur le fer et l’aluminium, en évoquant la sécurité nationale. Toujours en mars, il s’attaque directement au commerce avec la Chine en annonçant des tarifs sur 50 à 60 milliards de dollars de produits, ciblant la haute technologie. Le gouvernement chinois réplique en imposant à son tour des tarifs sur une foule de produits américains (noix, porc, soja, etc.). Les organisations internationales s’inquiètent de cette escalade protectionniste sur l’économie mondiale. D’autant plus qu’à ce moment, les États-Unis sont à renégocier le traité de libre-échange les liant au Canada et au Mexique, alors que le président Trump qualifie l’Union européenne, pourtant un allié traditionnel, d’ennemie de son pays. Après une brève accalmie, les hostilités commerciales reprennent entre juin et septembre 2018, toujours avec la Chine. Des taxes américaines frappent pour quelques centaines de milliards de dollars de produits chinois, entraînant des représailles de Beijing visant, entre autres, des États qui ont appuyé Donald Trump en 2016. Malgré des prévisions sombres, l’économie américaine continue de croître à un rythme élevé. Il en va toutefois de même du déficit commercial avec la Chine qui, en dépit des mesures adoptées, poursuit son ascension en 2018.
Dans les médias...
Pierre Haski, « Face à Trump, la Chine est-elle un ami ou un ennemi de l’Europe? »
«...La Chine de Xi Jinping est-elle un allié de l'Europe dans la tentative de sauver le système multilatéral mis à mal par Donald Trump ? Ou est-elle un rival, voire un ennemi, des démocraties libérales, dans un monde en recomposition globale ? Ou un peu des deux ? Cette question incongrue se pose à mesure qu'il apparaît clairement que le président des États-Unis, malgré ses incohérences et son zigzag diplomatique, est engagé dans une offensive généralisée contre le système multilatéral hérité des 70 dernières années, au profit d'une politique de puissance résumée par son slogan "America First". Il n'y a pas si longtemps, la question se serait posée en d'autres termes. Les Européens étaient devenus de plus en plus critiques vis-à-vis des pratiques commerciales chinoises, de l'absence de réciprocité, et de "routes de la soie" au bénéfice exclusif de Pékin. Tout ça a changé avec l'agressivité de Donald Trump qui a déclenché une guerre commerciale tous azimuts, y compris contre ses "alliés" européens dont il a déclaré qu'ils étaient des "ennemis" des États-Unis... »
L’Obs (France), 22 juillet 2018.
Arnaud Masset, « Quand Trump veut changer les règles »
«...Connaissant le tempérament imprévisible du président américain, il reste difficile de deviner l'objectif final de ces attaques frontales contre ses principaux partenaires commerciaux. Les États-Unis ont notamment menacé de taxer les importations en provenance de l'Union européenne, du Canada et du Mexique. Avant de pouvoir espérer une issue heureuse, il faudrait que l'administration Trump manifeste une quelconque volonté de négocier, mais aussi qu'elle révèle, dans une certaine mesure, quelles concessions de la part des Chinois elle espère obtenir. Pour l'instant, ces deux points restent flous. Dans un monde où la globalisation et le multilatéralisme sont désormais la règle, l'instauration de barrières commerciales de manière unilatérale ne peut que pénaliser le pays instigateur. Certes les États-Unis ne sont pas n'importe quel pays: ils restent la première économie mondiale et le dollar est encore la monnaie de réserve mondiale, ainsi que l'arme la plus puissante de son arsenal. Cependant, ses principaux partenaires commerciaux commencent à perdre patience face à l'insolence et l'autoritarisme du président états-unien. Il ne serait donc pas surprenant que les pays visés par ces taxes douanières entament des négociations dans le but d'opérer un rapprochement stratégique entre eux. »
Le Temps (Suisse), 10 juillet 2018, p. 11.
Arnaud Leparmentier, « Commerce : « La Chine a plus à perdre », selon la Maison Blanche »
«...Ce petit jeu fait craindre une escalade à durée indéterminée. D'autant que l'administration américaine croit jouer au plus fin avec les Chinois, estimant qu'ils n'auront bientôt plus de produits américains à taxer. " Nous avons importé pour 500 milliards de dollars de la Chine et exporté pour 130 milliards, a expliqué, mardi 19 juin, le conseiller de la Maison Blanche en matière commerciale, Peter Navarro. La Chine a beaucoup plus à perdre que nous. " Vers une dévaluation du yuan? Certes, mais la Chine dispose d'autres armes et l'a fait savoir par le biais du ministère du commerce. " Si les États-Unis souffrent d'un manque de rationalité et publient une nouvelle liste de droits de douane, la Chine adoptera des contre-mesures fortes, qui seront des mesures globales incluant quantité et qualité. " Les exégètes ont décrypté la menace : blocage des imports-exports dans les ports, multiplication des obstacles administratifs, ralentissement de l'approbation des acquisitions et implantations américaines en Chine... Ce risque explique la baisse des Bourses asiatiques. Les investisseurs redoutent que les sanctions n'en viennent à frapper des géants de l'industrie comme Boeing ou les groupes automobiles, ce qui aurait des conséquences économiques majeures. On peut même imaginer que la Chine se lance dans une dévaluation compétitive de sa monnaie, le yuan, pour compenser le coût de la guerre commerciale. Nous n'en sommes pas là. »
Le Monde (France), 21 juin 2018.
Éric Desrosiers, « La guerre commerciale entre les États-Unis et la Chine est commencée »
«...Afin d'éviter de toucher directement les consommateurs américains, les tarifs appliqués depuis vendredi par Washington visent l'importation de biens industriels intermédiaires chinois, comme des pièces d'avion et de voitures électriques ou encore de l'équipement lourd utilisé en agriculture, dans la construction et dans le secteur minier. Comme d'autres pays avant elle, la Chine a cherché, quant à elle, à ce que ses représailles fassent mal à la base électorale du président américain, en frappant notamment des produits agricoles, l'industrie automobile et le bourbon. Du jamais vu depuis les années 1930 Cette bataille de titans qui s'amorce entre les deux premières économies mondiales s'annonce comme la plus importante campagne de la guerre lancée par Donald Trump contre un ordre commercial international que le président qualifie de fondamentalement biaisé contre son pays. Depuis son entrée à la Maison-Blanche, il y a seulement un an et demi, le chef américain a notamment sorti son pays du Partenariat transpacifique et forcé la réouverture de l'Accord de libre-échange nord-américain (ALENA), en plus d'imposer au monde entier des tarifs sur l'acier et l'aluminium et de le menacer aujourd'hui de sanctions plus douloureuses encore dans l'automobile. Comme la Chine, le Canada, l'Union européenne et les autres pays touchés par ces tarifs ont pris le parti jusqu'à présent de ne jamais être les premiers à tirer, mais de rendre coup pour coup. »
Le Devoir (Québec, Canada), 7 juillet 2018, p. A9.
Ambrose Evans Pritchard, « Trump’s lack of strategic wisdom may spark an all-out economic war »
«...Trump's true intentions are anybody's guess. He is a compulsive improviser. His penchant for brinkmanship is plain to behold. He has a childlike idée fixe on China's $375bn trade surplus with the US. This is easily satisfied - if that is all he cares about. China can give him a "win" before the November mid-term elections. [...] Trump is surrounded by advisers who think China is currently more vulnerable than it looks. They calculate that a well-aimed shock might expose the structural cracks in the edifice, and that this may be their last chance to act. This is needlessly defeatist. China's underlying growth rate has already dropped to near 4 pc and may slide to 2 pc by the early 2020s. The country will not overtake the US this century on such a trajectory. Soon its people will be old. The wiser statecraft would be to combat China's prickly behaviour in a surgical fashion and in league with allies. But wisdom has run short at the White House. Trump seems to want an economic war. He may get one. »
The Telegraph (Royaume-Uni), 21 juin 2018, p. 2.
Gouvernance et gouvernement [ 22 mars 2018 ]
Pays | Niveau de démocratie | Chef de l'État | Chef du gouvernement |
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![]() | Élevé | Donald J. Trump | |
![]() | Faible | Xi Jinping | Li Keqiang |
Les informations précédentes renvoient précisement à la date de l'événement. Le niveau de démocratie est établi à partir des travaux de l'équipe de Polity IV. L'indice renvoie à la démocratie institutionnelle. Les noms des gouvernants sont établis à partir de nos bases de données les plus récentes. Là où on ne trouve aucun nom pour chef du gouvernement, il faut conclure que le chef de l'État est aussi, et sans intermédiaire, le chef du gouvernement, ce qui est le cas des systèmes présidentiels classiques (les États-Unis par exemple).