Poussée inflationniste dans plusieurs pays
Texte rédigé par l'équipe de Perspective monde
Poursuivant une tendance amorcée en 2021, l’inflation continue de croître de façon importante dans plusieurs pays au début de 2022. Dans les pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), elle atteint même des niveaux jamais vus depuis décembre 1990.
Plusieurs facteurs influencent l’augmentation des prix que l’on observe en 2021. La pandémie de la covid-19 a par exemple provoqué des ruptures sur les chaînes de production mondiales. Les sommes colossales injectées par les gouvernements afin de stimuler l’économie, et d’éviter une récession, ont également joué un rôle. Il en va de même de la pénurie de main-d’œuvre qui, dans plusieurs pays, incite les employeurs à augmenter les salaires. Par ailleurs, le coût des matières premières fait un bond, particulièrement celui des hydrocarbures, ce qui a des conséquences sur toute l’économie. Loin de s’estomper, cette situation prend un nouvel élan en février 2022, alors qu’un conflit éclate entre la Russie et l’Ukraine. Ainsi, de 7,2 % qu’il était en janvier 2022 en glissement annuel, c’est-à-dire par rapport à janvier 2021, le taux d’inflation passe à 7,7 % en février dans les pays de l’OCDE. Aux États-Unis, on constate même un taux de 8,5 % en mars, un sommet depuis la récession de 1982. Dans certains pays comme le Venezuela, l’Argentine et l’Iran, l’inflation est beaucoup plus élevée, mais il s’agit d’un problème de longue date qui ne fait que s’accentuer. Pour sa part, la Banque centrale russe anticipe un taux d’inflation de 22 % en 2022, un phénomène lié très étroitement aux sanctions appliquées contre elle en réaction à son intervention militaire en Ukraine. Cette poussée inflationniste amène rapidement des tensions sociales, notamment au Sri Lanka, au Pérou et dans certains pays d’Afrique. L’inquiétude face à cette situation, qui mine le pouvoir d’achat des populations, incite la Réserve fédérale américaine à hausser son taux directeur à quelques reprises à partir de mars 2022 afin de ralentir la consommation. La prudence reste toutefois de mise pour ne pas entraver la croissance économique et provoquer une récession qui aurait des répercussions mondiales.
Dans les médias...
Anne-Sophie Lechevallier, « L’inflation, carburant à inégalités »
«...Rien ne se passe comme prévu. D'abord, au moment du confinement, les économistes ont cru à un risque déflationniste (baisse des prix entraînant une baisse durable de l'investissement, des revenus et de l'activité). Mais les « quoi qu'il en coûte » massifs et les plans de relance successifs ont à la fois évité un effondrement de l'économie, dopé l'épargne, et soutenu une reprise vigoureuse. Pendant ce temps-là, l'offre s'est essoufflée, les chaînes d'approvisionnement n'en finissant plus d'être perturbées et les ports d'être saturés. C'est à ce contexte que les premiers signes d'inflation ont été attribués. Elle ne durerait pas et disparaîtrait sitôt l'activité revenue à la normale, pensait-on alors. Les Américains s'affolaient de l'accélération des prix ? C'était la faute de leur giga plan de relance. Les Européens voyaient les prix s'apprécier? C'était à cause de l'énergie, l'orage passerait. Au lieu de cela, l'inflation s'éloigne mois après mois des 2% en moyenne ciblés par nombre de banques centrales. Pis, elle tutoie les sommets du début des années 80 et réveille les angoisses enfouies depuis cette époque. »
Libération (France), 18 avril 2022, p. 14-15.
Alain Guillemoles, « Le retour de l’inflation, un défi pour les politiques économiques »
«...L'Europe vit un nouveau choc énergétique, qui réveille le souvenir de la crise de 1974. À l'époque, le quadruplement du prix du baril, à la suite de la guerre du Kippour, avait provoqué une envolée générale des prix. Aujourd'hui, rebelote : la soif de pétrole et de gaz, au moment où les Européens tentent de se passer de leur fournisseur russe, fait flamber le prix de l'énergie. Cela se produit au moment où l'économie était déjà en surchauffe du fait de la reprise post-Covid. Les tensions sur les approvisionnements en matières premières et dans la chaîne logistique font monter les prix dans l'ensemble de la zone euro. Au mois de mars, sur un an glissant, l'inflation y a atteint 7,5 %. En Espagne, elle est même de 9,8 %, un chiffre qui n'avait pas été atteint depuis trente-sept ans. Et en Allemagne, elle a atteint 7,3 %, du jamais-vu depuis plus de quarante ans. Dans ce contexte, la France s'en sort mieux. La hausse des prix est de 4,5 % en mars, toujours en rythme annuel. La France bénéficie de son système de tarif régulé et du bouclier tarifaire mis en place dès l'automne par le gouvernement. Il n'empêche, les Français ont l'impression de renouer avec la valse des étiquettes, une réalité qui avait quasiment disparu des mémoires. »
La Croix (France), 15 avril 2022, p. 24-25.
Michel Doucet, propos recueillis par Martin Vallières, « Garder le cap à travers la tempête »
«...Après la guerre en Ukraine, et la poussée de l’inflation, c’est maintenant l’anticipation d’une « guerre à l’inflation » par les banques centrales qui se démarque dans les perspectives des marchés financiers d’investissement. Aux États-Unis, les marchés anticipent maintenant huit hausses de taux cible par la Fed (Réserve fédérale) d’ici 12 à 18 mois, qui pourraient atteindre les 250 points de base (2,5 %). À mes yeux, il s’agit d’une enflure de propos alarmistes concernant l’inflation. Je m’attends plutôt à ce que les banques centrales fassent preuve de retenue pour ne pas étouffer l’économie après y avoir injecté des centaines de milliards en soutien financier durant la crise. Au Canada en particulier, avec l’endettement des ménages à un niveau record, ça ne serait pas long avant que des hausses de coûts d’intérêt viennent frapper dans leur budget, et se répercute ensuite dans l’économie. »
La Presse (Québec, Canada), 10 avril 2022, p. 2.
Jeanna Smialek, « Can Economy be Cooled, not Chilled? »
«...Near-term consumer and market inflation expectations have shot higher over the past year as inflation has hit a 40-year high and continued to accelerate, but longer-term price growth expectations have nudged only slightly higher. If consumers and businesses anticipated rapid price increases year after year, that would be a troubling sign. Such expectations could become self-fulfilling if companies felt comfortable raising prices and consumers accepted those higher costs but asked for bigger paychecks to cover their rising expenses. But after a year of rapid inflation, it is no guarantee that longer-term inflation expectations will stay in check. Keeping them under control is a big part of why the Fed is getting moving now even as a war in Ukraine stokes uncertainty. The central bank raised rates a quarter point this month and projected a series of interest rate increases to come. While officials would usually look past a temporary pop in oil prices, like the one the conflict has spurred, concerns about expectations mean they do not have that luxury this time. "The risk is rising that an extended period of high inflation could push longer-term expectations uncomfortably higher," Mr. Powell (Jeremy, le président de la Réserve fédérale) said this week. »
New York Times (États-Unis), 26 mars 2022, p. B1.
Gouvernance et gouvernement [ 0 février 2022 ]
Pays | Niveau de démocratie | Chef de l'État | Chef du gouvernement |
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![]() | Élevé | Joe Biden |
Les informations précédentes renvoient précisement à la date de l'événement. Le niveau de démocratie est établi à partir des travaux de l'équipe de Polity IV. L'indice renvoie à la démocratie institutionnelle. Les noms des gouvernants sont établis à partir de nos bases de données les plus récentes. Là où on ne trouve aucun nom pour chef du gouvernement, il faut conclure que le chef de l'État est aussi, et sans intermédiaire, le chef du gouvernement, ce qui est le cas des systèmes présidentiels classiques (les États-Unis par exemple).