2 mai 2025
25 octobre 2023

Assermentation de Robert Fico à la présidence du gouvernement slovaque

Texte rédigé par l'équipe de Perspective monde


Après une période d’instabilité, les Slovaques vont aux urnes le 30 septembre 2023. Ce scrutin marque le retour au pouvoir de l’ex-premier ministre Robert Fico, à la tête d’une coalition rassemblant trois formations. Donnant suite à un engagement de campagne, il fait savoir le lendemain de son assermentation la fin des livraisons d’armes à l’Ukraine.


Résultats du scrutin

En février 2020, une coalition multipartite, avec à sa tête le parti OL’aNO, de centre droit, met fin au règne du parti SMER (social-démocratie). Un membre de la coalition au pouvoir, Sas (Liberté et Solidarité), rompt toutefois les rangs, plaçant le gouvernement en minorité. Une motion de censure est adoptée contre lui le 15 décembre 2022. Lors d’un référendum tenu le 21 janvier 2023, les Slovaques se prononcent très favorablement pour une modification à la Constitution permettant éventuellement la tenue d’élections précipitées. La faible participation, 27,3 %, bloque toutefois ce changement. Les élus s’entendent par la suite sur un mécanisme prévoyant que l’appui de 60 % des députés au Conseil national suffise au déclenchement d’élections. Cette réforme mène à un nouveau scrutin le 30 septembre 2023. Après la démission d’Eduard Hager, le 7 mai, Ludovit Odor dirige le gouvernement jusqu’aux élections auxquelles il ne sera pas candidat. Les principaux thèmes de la campagne sont l’inflation, les questions migratoires ainsi que le maintien ou la fin de l’aide militaire à l’Ukraine dans son conflit avec la Russie. Le SMER est favorable à une telle rupture, suscitant des inquiétudes à l’Ouest. Le jour du scrutin, il arrive en tête avec 42 sièges et 22,95 % des voix, devant Slovaquie progressiste qui récolte 32 sièges grâce à 18 % des votes. Le HLAS-social-démocratie (27 sièges, 14,7 % des votes) est fortement courtisé pour former le gouvernement. Le 11 novembre, il accorde son appui au SMER. Avec lui, et le très conservateur Parti national slovaque, le SMER forme un gouvernement. Le 25 octobre, Robert Fico est assermenté. Conformément à son engagement, il annonce rapidement qu’il met un terme à la livraison d’armes à l’Ukraine. Les Slovaques se sont beaucoup intéressés à ces élections. Le taux de participation de 68,4 % est le plus élevé depuis 2002.

Dans les médias...

Delphine Dechaux, « La Slovaquie, nouveau cheval de Troie de la Russie en Europe? »

«...l'alliance entre la Hongrie et la Slovaquie ne va pas de soi, loin de là : le Nation slovaque a fondé son récit sur l'opposition à une Hongrie aux velléités dominatrices. Deuxième bémol important : le gouvernement de Robert Fico n'est pas celui de Victor Orban. Tandis que le Hongrois a les coudées franches, le populiste slovaque devra, lui, composer avec une force modératrice : le parti Hlas (« voix » en français), né d'une fission au sein du parti populiste de Robert Fico (le Smer) et dirigé par l'ancien président du gouvernement (équivalent du Premier ministre) Peter Pellegrini. Concrètement, les députés du Hlas pourraient se rallier à l'opposition si le gouvernement allait trop loin, à la fois sur les questions internationales mais aussi au plan intérieur. « Fico va obtenir la majorité pour sa déclaration de politique générale, mais, s'il prenait des positions trop radicales, il serait minoritaire sur les questions européennes », décrypte le chercheur (Lukas Macek). » D'ailleurs, Robert Fico a déjà reçu un premier avertissement de la part du Parlement slovaque : le jour même où il tenait un discours pro russe devant le Conseil de l'Europe, la Commission chargée des affaires européennes a adopté une déclaration dans laquelle on parle de la « nécessité de maintenir un soutien en tout genre à l'Ukraine », rapporte Lukas Macek. »

Challenges (France), 28 octobre 2023.

Maria Udrescu, « Sommet européen : Robert Fico se fait remarquer, mais Viktor Orban reste le maître inégalé du trolling »

«...Tadam ! C'est une volte-face encore jamais vue parmi les alliés occidentaux, d'autant que ce pays d'Europe orientale s'était jusqu'ici fort engagé pour soutenir Kiev, dans la même veine que ses voisins de la région - à l'exception notable de la Hongrie. Bratislava fournissait à l'Ukraine des avions de combat (des MiG-29 de conception soviétique), des Manpads (systèmes portatifs de défense sol-air) ou encore un système de défense antiaérienne, en plus de réparer les armements utilisés par les soldats ukrainiens. Mais ça, c'était avant que Robert Fico ne s'installe au pouvoir mercredi, s'alliant, sans état d'âme, avec un parti d'extrême droite, et prorusse ("qualité" que M. Fico détient lui-même). Sauf que même le Kremlin n'a pas eu l'air très impressionné par ce "geste de solidarité". "La part de la Slovaquie dans les livraisons d'armes (à Kiev, NdlR) n'était pas si grande, et c'est pourquoi cela ne va guère affecter tout le processus" , a déclaré à la presse le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, dans un excès étonnant de franchise. Si même la Russie le dit... Côté européen, l'annonce de M. Fico a beau nourrir les inquiétudes, elle n'a pas de quoi déstabiliser complètement l'Union non plus. C'est bien le risque quand on se contente de plagier le maître absolu du trolling européen : Viktor Orban. »

La Libre (Belgique), 26 octobre 2023.

Nelly Didelot, « Le Conseil européen, premier test géopolitique pour le Slovaque Robert Fico »

«...Avec ce cabinet, Fico poursuit sur la lignée de sa campagne, lors de laquelle il a promis de ne plus envoyer «une seule balle» à l'Ukraine, de mettre un terme aux sanctions contre la Russie et de refuser toute immigration. La Slovaquie, qui a été parmi les premiers pays à envoyer à Kyiv chars et avions de combat, n'a plus grand-chose dans ses entrepôts à transmettre à l'Ukraine. Mais sous l'impulsion de Fico, Bratislava pourrait s'ingénier à bloquer les paquets d'aide européens à Kyiv, comme Budapest a déjà entrepris de le faire. [...] « Fico est un homme pragmatique, pas un idéologue. A chacune de ses élections, il a construit le discours nécessaire pour gagner, puis il a tenu un discours à Bratislava et un autre plus complaisant à Bruxelles, rappelait en septembre auprès de Libé Jana Vargovcikova, maîtresse de conférences à l'Inalco. Il faut aussi prendre avec une certaine distance ses critiques de l'Otan et de Washington. La relation avec les Etats-Unis est clé pour tous les pays d'Europe centrale et il aurait beaucoup à perdre en la malmenant. » De fait, l'une des premières déclarations de Fico après la signature de l'accord de coalition a été très tempérée. »

Libération (France), 26 octobre 2023.

Jason Burke, « A ‘technician of power’ : Robert Fico, Slovakia’s veteran populist »

«...The Smer leader (Fico) himself faced criminal charges, which he has always denied, over allegedly creating a criminal group and misuse of power, but Slovakia’s prosecutor-general threw out the indictment. This offered further motivation to win back power. “He is borrowing from Trump and will do and say what is needed, taking from right and left. He’s been very skilful at positioning himself as anti-establishment. His main interest now is to dismantle the judicial effort … He is escaping by winning,” said Milan Nič, a senior research fellow at the German Council on Foreign Relations, shortly before last month’s poll. To this end, Fico has embraced more extreme positions that include attacks on western allies, pledges to stop military support for Kyiv, criticism of Russian sanctions and threats to veto any future Nato invitation for Ukraine. He has also worked hard to exploit the division between older, more conservative provincial voters and those in the capital, Bratislava, with its more progressive culture, and wealthier and often more educated population. »

The Guardian (Royaume-Uni), 25 octobre 2023.

Gouvernance et gouvernement [ 25 octobre 2023 ]

Pays Niveau de démocratie Chef de l'État Chef du gouvernement
flagSlovaquieÉlevéZuzana Čaputová Robert Fico

Les informations précédentes renvoient précisement à la date de l'événement. Le niveau de démocratie est établi à partir des travaux de l'équipe de Polity IV. L'indice renvoie à la démocratie institutionnelle. Les noms des gouvernants sont établis à partir de nos bases de données les plus récentes. Là où on ne trouve aucun nom pour chef du gouvernement, il faut conclure que le chef de l'État est aussi, et sans intermédiaire, le chef du gouvernement, ce qui est le cas des systèmes présidentiels classiques (les États-Unis par exemple).

Évolution des composantes du système politique

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