1 avril 2025
25 octobre 1993

Élection au Canada du Parti libéral de Jean Chrétien

Texte rédigé par l'équipe de Perspective monde


Jean Chrétien

Le Parti libéral de Jean Chrétien remporte les élections législatives avec 41,3 % des votes. Il fait élire 178 députés à la Chambre des communes contre 54 pour ses plus proches rivaux, le Bloc québécois de Lucien Bouchard.


Résultats du scrutin

Successeur de John Turner à la tête des libéraux, l'ex-ministre Jean Chrétien permet aux siens de renouer avec le pouvoir après neuf années passées dans l'opposition. Ses principaux appuis proviennent des Maritimes et de l'Ontario. Le Bloc québécois, une formation dirigée par l'ancien ministre progressiste-conservateur Lucien Bouchard qui a vu le jour à la suite de l'échec de l'Accord constitutionnel du lac Meech, obtient 54 des 75 sièges en jeu dans la province de Québec. Ce succès cause des inquiétudes au Canada car le Bloc milite pour la souveraineté du Québec. Dans les provinces de l'Ouest, c'est le Parti réformiste, un parti de droite dirigé par Preston Manning, qui a la faveur de l'électorat avec 52 députés. De leur côté, les progressistes-conservateurs de Kim Campbell, première femme à diriger le gouvernement canadien, n'obtiennent que deux circonscriptions dans tout le pays. C'est la baisse de popularité la plus importante jamais enregistrée par cette formation politique qui avait remporté les élections générales de 1984 et 1988 en faisant élire 211 et 173 députés.

Dans les médias...

Lise Bissonnette, « Le Canada, triple fracture »

«...La signature de ce lundi rouge est en fait de couleur bleu nuit. La disparition du Parti progressiste-conservateur du Canada (et à un degré moindre celle du Nouveau Parti démocratique) enterrent pour l'instant le rêve de partis pancanadiens, capables de forger une coalition qui se voudrait « nationale » comme on dit hors Québec. (...) Le PLC a beau avoir remporté le scrutin avec une vingtaine de sièges de plus que les conservateurs sortants, il n'est plus qu'un parti régional, porté au pouvoir par l'Ontario et l'Atlantique, avec une unanimité qui prend des allures « tribales ». Le Bloc québécois domine le Québec. Le Reform Party prend la relève, de la Saskatchewan au Pacifique. Ici et là, de timides exceptions confirment la règle. Les fractures géographiques, on le sait, recouvrent des divisions plus profondes encore. Ce sont trois idées du Canada, mutuellement exclusives, qui s'affrontent désormais aux Communes : l'orthodoxie libérale centralisatrice reprend du pouvoir tandis que sont légitimés, pour la première fois aux Communes, le mouvement autonomiste ou souverainiste québécois et le Canada sans « différences » que veut dessiner le Reform Party. Les hérésies d'hier, lépreuses au Parlement central, viennent de recevoir une bénédiction démocratique. »

Le Devoir (Quéec, Canada), 27 octobre 1993, p. A8.

Alain Dubuc, « Une victoire sans lune de miel »

«...la célébration de cette victoire, pourtant convaincante, sera de courte durée. Rarement aura-t-on vu un nouveau premier ministre canadien entreprendre son premier mandat dans des conditions aussi difficiles. Contrairement à ses prédécesseurs, Jean Chrétien ne pourra pas compter sur une lune de miel. (...) Pourquoi réservera-t-on ce traitement à Jean Chrétien ? Cela s'explique en partie par une méfiance plus grande des citoyens, trop souvent échaudés par leurs emportements passés, plus cyniques que jamais face aux engagements des politiciens. Cependant, cela est surtout dû à la personnalité du prochain premier ministre. M. Chrétien n'est pas un nouveau venu, mais un vieux politicien qui, avec trente ans de politique dans le corps, accède à une promotion, grâce à un programme équilibré mais classique, prolongement naturel des politiques que préconisait son parti lorsqu'il était au pouvoir. Bref, il n'y a rien de nouveau qui permette un espoir démesuré, aucun mystère, aucune magie qui permette de croire à un miracle. On ne peut s'imaginer, comme on l'a fait pour Mme Campbell, que l'image de façade de M. Chrétien cache un grand leader, qui se révélera une fois au pouvoir. »

La Presse (Québec, Canada), 26 octobre 1993, p. B2.

Jean Lesieur, « Le Québec fait Bloc »

«...alors que s'opposaient jusqu'à présent les fameuses « deux solitudes » (le Québec et les « Anglais »), voici que la confusion la plus totale s'installe. Le Premier ministre fédéral est francophone, mais il a été complètement désavoué au Québec (où Chrétien n'a obtenu que 15 % des suffrages des « parlants-français »); Lucien Bouchard, chef de l'opposition officielle - qui a une fonction constitutionnelle très importante - a pour objectif la destruction du Canada tel qu'il existe; quant au troisième larron, Preston Manning, il ne verrait, au fond, aucun inconvénient à ce que l'idée qui fonde le Canada contemporain - bilinguisme et biculturalisme - soit jetée aux oubliettes. N'en déplaise à Jean Chrétien, la voie semble donc royale, en effet, pour les tenants de l'avènement d'un « Québec libre ». Mais pareil constat ne doit pas faire oublier la propension éternelle des Canadiens, de tous les Canadiens, à se complaire dans ce jeu de bascule plus ou moins subtil qui se confond presque avec l'identité nationale. »

L'Express (France), 11 novembre 1993, p. 12.

S.A., « When the party's over »

«...The Liberal majority at least provides a sense of security for many Canadians who have been buffeted by enormous change and uncertainty. One could almost sense the search for a safe haven in the storm, enhanced by Jean Chrétien's assuring hominess and the competent management of the Liberal campaign. On the one side, outside Quebec, the Bloc threatened national unity. On the other side, especially in the West and suburban Ontario, Reform raised the spectre of social conflict and zealously pursued change. When in doubt, many Canadians turned to the Liberals as an insurance policy covering their fundamental interests - and that is not so hard to understand. Unfortunately, the Liberals will probably spend the first several years of their mandate avoiding the tough economic choices demanded by the public interest. They will borrow too much - and foreign lenders will let them. They will change too little - and Canadian voters will thank them. And five years from now, as the pressures created by public debt and interest charges become unbearable, the days of reckoning will be harder and darker than they might have been. »

The Globe and Mail (Canada), 26 octobre 1993, p. A30.

Gouvernance et gouvernement [ 25 octobre 1993 ]

Pays Niveau de démocratie Chef de l'État Chef du gouvernement
flagCanadaÉlevéRamon (Ray) HnatyshynJean Chrétien

Les informations précédentes renvoient précisement à la date de l'événement. Le niveau de démocratie est établi à partir des travaux de l'équipe de Polity IV. L'indice renvoie à la démocratie institutionnelle. Les noms des gouvernants sont établis à partir de nos bases de données les plus récentes. Là où on ne trouve aucun nom pour chef du gouvernement, il faut conclure que le chef de l'État est aussi, et sans intermédiaire, le chef du gouvernement, ce qui est le cas des systèmes présidentiels classiques (les États-Unis par exemple).

Évolution des composantes du système politique

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