2 avril 2025
22 janvier 1963

Signature d'un traité entre la France et l'Allemagne

Texte rédigé par l'équipe de Perspective monde


Charles de Gaulle, Konrad Adenauer

Le président de la France, Charles de Gaulle, et le chancelier de la République fédérale d'Allemagne (RFA), Konrad Adenauer, sont réunis à Paris afin de signer un traité qui marque une volonté de coopération accrue entre les deux pays.

Ce traité de réconciliation prévoit la tenue de rencontres sur une base régulière entre les chefs d'État et de gouvernement des deux pays, ainsi qu'entre des ministres et hauts fonctionnaires influents, notamment ceux du ministère de la Défense et du ministère des Affaires étrangères. Des rencontres sont également prévues afin de faire avancer des dossiers dans le domaine de l'éducation et de la culture. Dans une déclaration commune, les signataires du traité se disent « convaincus que la réconciliation du peuple allemand et du peuple français, mettant fin à une rivalité séculaire, constitue un événement historique qui transforme profondément les relations entre les deux peuples ». Une des dispositions stipule même que « les deux gouvernements se consulteront, avant toute décision, sur toutes les questions importantes de politique étrangère, et en premier lieu sur les questions d'intérêt commun, en vue de parvenir, autant que possible, à une position analogue ». Aux yeux de plusieurs analystes, la France, par la conclusion de ce traité bilatéral, cherche à consolider ses relations avec la RFA, mais aussi à affirmer son leadership sur le continent européen et son indépendance face à l'influence américaine. La signature du traité survient d'ailleurs au moment où le débat fait rage sur l'opposition de la France à l'entrée du Royaume-Uni au sein de la Communauté économique européenne.

Dans les médias...

Stanley Hoffman, « De Gaulle, l'Europe et l'Alliance »

«...Ce que veut le Général dans la moitié d'Europe qui reste de ce côté-ci du rideau de fer, c'est européaniser les Européens; c'est-à-dire leur rendre à la fois le sens d'une destinée commune et le sens d'une grande destinée. (...) Il ne peut y avoir d'entité européenne si l'Allemagne occidentale n'est pas amarrée solidement, définitivement, à l'Europe de l'Ouest. La seule façon d'amarrer l'Allemagne, de la dissuader d'aller chercher sa réunification dans des concessions à l'U.R.S.S. - adversaire principal actuel de l'Europe - de la détourner aussi une fois pour toutes des aventures agressives, c'est, pour la France en particulier, de montrer une large compréhension à l'Allemagne de l'Ouest lorsque les intérêts fondamentaux de celle-ci sont en jeu, afin de lui prouver qu'elle n'a besoin de se tourner pour leur défense, ni vers l'Est, ni vers les seuls États-Unis, puisque la France est là, qui à la fois la soutient, et la soutenant la contient. Sur ce plan, le Général n'a fait que reprendre la politique de ses prédécesseurs. »

Esprit (France), juin 1963, p. 1067.

Robert Bony

«...Il y a dans cette conception de l'Europe telle que la veut de Gaulle, c'est-à-dire coupée de la Grande-Bretagne et guidée par deux États, en quelque sorte souverains, la France et l'Allemagne, un péril dont les dimensions ne sauraient échapper à quiconque. (...) Nous savons bien que de Gaulle ne se dissimule nullement les prolongements possibles d'une telle politique, mais qu'il a aussi d'autres perspectives. Pour tout dire, il ne pense pas ou ne pense plus que le destin de l'Europe soit d'être définitivement « amarrée » à l'Amérique. La carte sur laquelle il se réserve de jouer éventuellement c'est, nul ne l'ignore, la carte soviétique. Pour peu que l'Europe ne soit plus inféodée à l'Amérique, ce rapprochement s'inscrit, à ses yeux, dans le cours de l'Histoire. D'où le détachement qu'il marque volontiers à l'égard des États-Unis, et de la Grande-Bretagne, tenant celle-ci pour incapable de s'affranchir de l'attraction des États-Unis. Cette politique qui consiste à relâcher nos liens avec les Anglo-saxons, nos alliés traditionnels, pour nous tourner vers l'Allemagne, voire pour regarder beaucoup plus loin vers l'Est, souhaitons qu'elle ne soit pas pour la France une dangereuse aventure. »

L'Aurore (France), 23 janvier 1963.

André Laurendeau, « Vers une Europe gaullienne ? »

«...Le président français propose de construire en Europe une troisième force qui échappe, dans une large mesure, à l'hégémonie américaine. Serait-ce pour que l'Europe tombe sous une hégémonie franco-allemande ? Telle est la question posée par les junior partners de l'entreprise. On doit se demander, aussi, dans quelle mesure l'alliance franco-allemande pourra survivre au départ d'Adenauer. Bref, la politique proposée par la France ne dépasse-t-elle pas, en Europe même, les forces de la France actuelle. En outre, ce fractionnement est-il heureux ? Les partisans d'un ensemble atlantique estiment évidemment que ce serait une grave erreur : en face du camp communiste, l'unité occidentale est nécessaire, dit-on. Le point de vue devient peut-être anachronique à l'heure du différend sino-russe. Les raisons qui militaient jadis en faveur de l'OTAN n'ont pas disparu, mais elles apparaissent moins contraignantes, aujourd'hui que l'Europe s'est relevée. »

Le Devoir (Québec, Canada), 26 janvier 1963, p. 4.

S.A., « A Problem of Personality »

«...When West Germany's 87-year-old Chancellor Konrad Adenauer returned to Bonn after signing the Franco-German Treaty of Cooperation in Paris, he got jeers instead of cheers for kowtowing to France's leader. Angry headlines lashed his failure to hold out for Britain's Common Market entry as part of the bargain; and, what was worse, the Bonn Cabinet itself promptly slapped der Alte with a unanimous vote to support the British in Brussels. (...) Not very many Germans or very many other Europeans could be happy with the grandiose task Charles de Gaulle had set himself. In the long run, it was creation of a Gaullist third force in the great-powers equation. En route, he was rejecting supranational Europe, brushing aside the proposed multilateral nuclear determent to preserve total weapons sovereignty for himself, rebuffing Britain for frankly selfish political reasons, and, in fact, rejecting the whole Atlantic Community concept with its overtones of American participation. »

Time (édition canadienne), 1e février 1963, p. 22.

Gouvernance et gouvernement [ 22 janvier 1963 ]

Pays Niveau de démocratie Chef de l'État Chef du gouvernement
flagFranceIntermédiaireCharles de GaulleGeorges Pompidou
flagAllemagneÉlevéKarl Heinrich LübkeLudwig Erhard

Les informations précédentes renvoient précisement à la date de l'événement. Le niveau de démocratie est établi à partir des travaux de l'équipe de Polity IV. L'indice renvoie à la démocratie institutionnelle. Les noms des gouvernants sont établis à partir de nos bases de données les plus récentes. Là où on ne trouve aucun nom pour chef du gouvernement, il faut conclure que le chef de l'État est aussi, et sans intermédiaire, le chef du gouvernement, ce qui est le cas des systèmes présidentiels classiques (les États-Unis par exemple).

Évolution des composantes du système politique

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Chronologie 1958 - 1968





































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