Ouverture du XVIe Congrès du Parti communiste chinois
Texte rédigé par l'équipe de Perspective monde

Jiang Zemin
Le XVIe Congrès du Parti communiste chinois (PCC) est marqué par un changement de la garde alors que Hu Jintao succède à Jiang Zemin au poste de secrétaire général. L'orientation générale du PCC reste néanmoins axée sur l'importance de créer un climat propice au développement de l'entreprise privée et de la croissance économique du pays.
Pour en savoir plus: Pour la construction en grand d'une société au niveau de vie relativement aisé ...
La Chine continue de connaître une forte croissance économique, mais elle doit aussi composer avec des problèmes de chômage que l'on cherche à atténuer en limitant les mises à pied au sein des entreprises privatisées récemment. Dans son message d'ouverture, le secrétaire général Jiang Zemin fait tout de même un bilan élogieux de son dernier mandat, insistant sur l'importance de poursuivre les réformes économiques en conservant la stabilité politique dont le pilier est le rôle central du PCC. Il veut améliorer la protection légale de la propriété privée, briser les monopoles gouvernementaux, encourager le libre marché et favoriser la classe moyenne dans un pays qui compterait maintenant plus de 2 millions d'entreprises privées. Le 14 novembre, un amendement à la Constitution du PCC est adopté afin d'intégrer la théorie des trois représentativités de Jiang Zemin, faisant de ce dernier un des grands réformistes du pays dans la lignée de Mao Zedong et Deng Xiaoping. La question de sa succession, sujette à bien des hypothèses, est finalement réglée le 15 novembre alors que Hu Jintao, 59 ans, accède au poste de secrétaire général. Premier leader du PCC à ne pas avoir participé à la révolution de 1949, celui-ci occupait déjà des fonctions importantes au sein du parti, notamment de l'influente Commission des Affaires militaires. Les analystes sont partagés quant à l'impact que ce changement aura. Ils rappellent que Hu Jintao était un protégé de Jiang Zemin. De plus, ils s'interrogent sur le rôle que continuera de jouer ce dernier, même à 76 ans. Bien qu'il quitte la présidence en 2003, Jiang Zemin conservera en effet la direction de la Commission des Affaires militaires jusqu'en 2004. De plus, la majorité des membres du Comité permanent du Bureau politique du PCC sont ses protégés.
Dans les médias...
Frédéric Koller, « Ces nouveaux venus qui pourraient changer la Chine »
«...Une nouvelle génération de Chinois accède ainsi à un confort inconnu jusqu'ici: après l'achat d'un appartement, ils ont fait le pas, cette année, et investi dans un véhicule. Accrochés à leur téléphone portable, grands consommateurs d'Internet, fascinés par les États-Unis, ils courent pour rattraper le retard de leurs parents et leurs mentalités évoluent rapidement. Entre eux, le parti communiste est le plus souvent un sujet de plaisanterie. Pour l'heure, ils lui reconnaissent toutefois encore une forme de légitimité: il a su assurer ces dernières années la stabilité politique et, par conséquent, la croissance. C'est pour éviter que ce nouveau pouvoir économique ne débouche tôt ou tard sur des revendications politiques que le Parti communiste cherche désormais à intégrer ces enfants de Deng Xiaoping. L'objectif majeur est de rallier la classe des entrepreneurs privés. À vrai dire, un certain nombre d'entre eux sont déjà dans le parti suite à une glissade du statut de leur entreprise du « public » vers le « privé ». Il s'agit donc de régulariser leur situation, mais surtout d'attirer les plus jeunes de ces entrepreneurs, les forces vives du capitalisme chinois. Ceux-ci montrent toutefois un intérêt modéré. »
Le Temps (Suisse), 15 novembre 2002.
Pierre Haski, « Ultralibéralisme et archaïsme politique »
«...Il faut assurément beaucoup de conviction pour « vendre » à 1,3 milliard de Chinois l'idée que le pouvoir actuel perpétue l'héritage de Mao Zedong et des chefs historiques. Les panneaux qui, à travers le pays, montrent Mao, Deng Xiaoping et Jiang Zemin comme les trois « géants » du communisme chinois, flattent sans doute l'orgueil de l'actuel numéro un, mais ne trompent que les paysans les plus éloignés des centres urbains, modernes et de plus en plus ouvertement capitalistes. C'est quand la Chine a commencé à s'éloigner du dirigisme catastrophique de l'ère maoïste qu'elle a pu s'en sortir et améliorer le niveau de vie de ses citoyens, mais il ne faut surtout pas le dire trop fort... Du communisme, il ne reste que la structure politique qui quadrille le pays, un appareil policier aux doux relents staliniens, et la phraséologie du marxisme-léninisme. Pour le reste, la Chine a développé une économie mixte laissant une part importante à l'entreprise privée et aux capitaux étrangers qui affluent par milliards de dollars dans un pays qui devient progressivement l'« usine du monde ». Un secteur privé chinois qui devrait faire son entrée dans un parti tournant le dos au prolétariat et à la paysannerie, pour courtiser les nouvelles couches sociales plus « bourgeoises ». »
Libération (France), 8 novembre 2002, p. 8.
Dominique Bari, « « La quatrième génération » monte en première ligne »
«...Ce qui marquera plus sûrement ce 16e congrès sera l'interprétation qui sera faite de la doctrine de la « la triple représentativité » défendue par Jiang Zemin. Une théorie, que prenant en compte les mutations sociales de ces dernières années, appelle à intégrer dans les rangs du parti voire même au sein du Comité central, ces fameux entrepreneurs privés, les grands gagnants des réformes économiques. Affirmant que le coeur de la souveraineté économique (télécommunications, énergie, etc.) restera étatique, cette proposition consacre à la fois le poids accordé au secteur privé dans le développement économique et parallèlement le rôle croissant d'une nouvelle couche de privilégiés. Si ces entrepreneurs privés ne sont pas intégrés dans le Parti, ils seront enclins à développer leurs propres réseaux et le divorce entre le pouvoir politique et ce groupe - de plus en plus lié à l'économie mondialisée par la voie de l'OMC et de plus en plus indépendant du gouvernement chinois - est considéré à terme comme dangereux pour le PCC. »
L'Humanité (France), 8 novembre 2002, p. 14.
Michel de Grandi, « La Chine oublie la lutte des classes »
«...Le parti règne toujours en maître absolu au nom de la nécessaire stabilité sociale. Et il dirige l'État sans laisser de place à un quelconque droit constitutionnel. Quant à sa structure, elle demeure figée depuis des décennies. Chaque niveau de l'État et du gouvernement reste doublé par un échelon du parti. Depuis le bureau politique jusqu'au secrétariat général de village, instance locale très influente, en passant par les secrétariats généraux des provinces et des municipalités, le PC est omniprésent. Souvent, d'ailleurs, les hommes sont les mêmes. (...) Enfin et surtout, la haute moralité que le parti exige de ses militants de base fait long feu dès que l'on remonte dans la hiérarchie. La corruption est partout. Dénoncée par les autorités comme un fléau national, elle tarde d'autant plus à reculer qu'elle confère aux responsables, locaux ou nationaux, à quelques exceptions près, une double puissance : celle du pouvoir et celle de l'argent. La population se désintéresse du XVIe congrès, pas de la corruption. C'est même le premier mot qui vient à l'homme de la rue lorsqu'il parle de ses dirigeants. Tout en précisant forcément que, du temps de Mao, c'était différent. »
Les Échos (France), 8 novembre 2002, p. 43.
Joseph Kahn, « China's Congress of Crony Capitalists »
«...the party is rewriting its constitution to declare that it represents « advanced forces » - capitalists - as much as workers and peasants. Rich people have begun joining the party. A few may be invited to join its policy-making Central Committee. This is China's baldest acknowledgment since veering from orthodox socialism in the late 1970's that it will make workers and peasants fend for themselves. Dictatorship of the proletariat has failed. So the party is giving plutocracy a chance. Jiang Zemin, the Communist Party chief who plans to retire after the Congress adjourns, has buried the last real pretenses of socialism. « All legitimate income, from work or not, should be protected, » he told the party Congress on Friday. The old China defended the working class against the capital class. In the new China, Mr. Jiang said, « the fundamental interests of the people of the whole country are identical. » This new strategy marks a calculated gamble to « keep up with the times, » as Mr. Jiang said repeatedly, by mimicking capitalist-oriented authoritarian regimes, like the old South Korea, Taiwan and Chile. The fact that those countries have long since become democracies does not disturb party officials. They argue that the transition took 30 years in South Korea and Taiwan. China has just begun. »
New York Times (États-Unis), 10 novembre 2002, p. 41.
Gouvernance et gouvernement [ 8 novembre 2002 ]
Pays | Niveau de démocratie | Chef de l'État | Chef du gouvernement |
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![]() | Faible | Jiang Zemin | Zhu Rongji |
Les informations précédentes renvoient précisement à la date de l'événement. Le niveau de démocratie est établi à partir des travaux de l'équipe de Polity IV. L'indice renvoie à la démocratie institutionnelle. Les noms des gouvernants sont établis à partir de nos bases de données les plus récentes. Là où on ne trouve aucun nom pour chef du gouvernement, il faut conclure que le chef de l'État est aussi, et sans intermédiaire, le chef du gouvernement, ce qui est le cas des systèmes présidentiels classiques (les États-Unis par exemple).