2 avril 2025

14 septembre 2008

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Angola : des élections législatives sans surprise

Le 5 septembre 2008, le peuple angolais a été invité à aller voter pour renouveler leurs députés à l'issu d'une campagne dominée par le parti au pouvoir. Bien que pratiquement aucun acte de violence n'ait été à déplorer, ces élections législatives se sont déroulées dans un climat tendu.

Un semblant de démocratie

Ces dernières semaines, Luanda, la capitale angolaise, a vécu au rythme de la campagne électorale. Ces élections, les premières depuis 16 ans, sont considérées comme un événement historique autant par la communauté internationale que par le peuple angolais lui-même. En effet, la forte mobilisation des citoyens témoigne de l'importance que ceux-ci ont attachée au scrutin : les 12 274 bureaux de vote du pays n'ont pas désempli (1).

Au pouvoir depuis 1965, le Mouvement populaire de l'indépendance de l'Angola (MPLA) et son chef, le président José Eduardo dos Santos, ont en tête un objectif ambitieux : obtenir une majorité des deux tiers, seuil nécessaire à d'éventuelles modifications constitutionnelles. Pour ce faire, ils n'ont ménagé aucun effort, transformant le pays en « marée rouge, noire et or, les couleurs du MPLA » (2).

Perçues comme une victoire par l'Union européenne (UE), ces élections ont été un pas en avant pour la démocratisation du pays. Le président français, Nicolas Sarkozy, a tenu à adresser « ses sincères félicitations » au président angolais, Jose Eduardo Dos Santos. Il n'a pas non plus manqué de lui rappeler que la France restera « fidèle à ses engagements » et qu'elle « se tiendra résolument aux cotés » (3) de cette nation qui, rappelons-le, est la seconde plus grande puissance pétrolière du continent africain.

Quant à la chef de mission des observateurs de l'UE, Luisa Morgantini, elle « se réjouit du déroulement pacifique de ces élections et félicite l'ensemble des acteurs politiques angolais pour leur action déterminée ». Elle émet tout de même de légères réserves concernant certaines « difficultés de procédure et de logistique » retardant la parution des résultats (4).

Une élection fantoche

En revanche, pour Isaias Samakuva, le leader de l'Unita, le principal parti d'opposition, ces difficultés de procédures et de logistique sont bien plus que de simples problèmes d'organisation. Selon lui, « le résultat de cette élection ne serait pas équitable », en raison de l'omniprésence médiatique du parti au pouvoir : mercredi a été le premier jour de la semaine où le journal d'État « Jornal de Angola » ne présentait pas, en page de couverture, la photo du président Jose Eduaro dos Santos (5).

Pour les leaders de l'opposition, ces élections ne sont donc rien de plus qu'une mascarade, organisée par le gouvernement, destinée à redorer le blason de la démocratie face à la communauté internationale. Et si le président a permis à ces élections d'avoir lieu, c'est uniquement parce qu'il savait parfaitement que la victoire lui serait assurée. Les événements survenus au cours de la campagne sont, selon l'opposition, une confirmation de ses accusations. En effet, les cas d'intimidation ou de manipulation sont nombreux, comme, par exemple, la distribution gratuite de télévisions, radios ou même de voitures, aux foules rassemblées pour aller voter (6).

C'est donc sans surprise que le peuple angolais a pris connaissance des résultats provisoires donnant grand vainqueur le MPLA, avec plus de 80 % des voix (7). José Eduardo dos Santos, testant sa popularité à un an de l'élection présidentielle, semble plus que jamais déterminé à poursuivre la fabuleuse ascension économique de l'Angola. Mais pour les Angolais moyens, le boom économique ne se traduit pas par une amélioration de leur condition de vie. Il se pourrait donc que le MPLA, parti anciennement marxiste ayant cédé aux sirènes du capitalisme, perde de son influence auprès de la partie de la population qui concentre les indicateurs les plus faibles du point de vue de l'espérance de vie, de l'éducation et de la richesse (8).

Cette part de la population étant loin d'être négligeable, il se pourrait que l'élection présidentielle ne soit pas gagnée d'avance, à condition bien sûr, que le peuple angolais ne change de perception avant 2009.




Références:

(1) AFP, Angola: élections législatives, les premières depuis la fin de la guerre civile http://afp.google.com/article/ALeqM5gedZDUyw6KoQhh... 6 sept. 2008. Page consultée le 12-09-08.

(2) loc.cit.

(3) Élections législatives en Angola : lettre du président de la République française http://www.diplomatie.gouv.fr/fr/europe_828/presid... le 10 septembre 2008. Page consultée le 12-09-08.

(4) Lettre de Nicolas Sarkozy adressée au président de la République d'Angola, Jose Eduardo dos Santos http://www.diplomatie.gouv.fr/fr/europe_828/presid... le 10 septembre 2008. Page consultée le 12-09-08..

(5) BBC News, Angola's troubled election close, http://news.bbc.co.uk/2/hi/africa/7601435.stm. Last updated at 20:48 GMT, Saturday, 6 septembre 2008 21:48 UK. Page consultée le 12-09-08.

(6) loc.cit.

(7) Pierre-François NAUDÉ, "Angola : en voie de démocratisation ? " Jeune Afrique Nº 2488 du 14 au 20 septembre. Page 62-66.

(8) Alex DUVAL SMITH, Courrier international Nº 931, du 4 au 10 septembre. Page 25. Extrait de The Observer.

Dernière modification: 2008-11-21 08:24:56

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