Démission du président brésilien Fernando Collor
Texte rédigé par l'équipe de Perspective monde

Fernando Collor
En 1991, le président brésilien Fernando Collor est accusé de corruption et d'avoir soutenu un réseau d'influence administré par son trésorier de campagne. Après enquête, la Chambre des députés entame le processus de mise en accusation et de destitution, ce qui incite Collor à démissionner le 29 décembre 1992.
Premier président élu directement par les Brésiliens depuis 1960, Fernando Collor entra en fonctions le 15 mars 1990. Son monde bascula en 1991, alors que son frère Pedro l'accusa de corruption et d'être impliqué dans un réseau d'influence administré par son trésorier de campagne, Paulo C. Farias. Pendant que la police fédérale et le Parlement brésilien enquêtent, Collor fait un discours télévisé dans lequel il demande au peuple de le supporter face à cette tentative de coup d'État. Mais le 11 août 1992, le Syndicat national des étudiants manifeste contre lui. Puis, le 26 août, le Congrès rend public un rapport démontrant que Collor a, grâce à des transferts de fonds, utilisé de l'argent fourni par Farias pour des dépenses personnelles. Selon le Congrès, ce dernier aurait détourné $50 millions de la campagne de Collor et utilisé ses relations avec le président pour obtenir de l'argent de gens d'affaires cherchant à influencer le gouvernement. Collor nia devant la Chambre des députés avoir reçu une partie de cet argent pour ses dépenses personnelles. Il fit aussi pression sur des députés en ordonnant au service des revenus d'enquêter sur eux. En vain. Le 29 septembre, les députés se prononcent à 441 contre 38 pour entamer le processus de destitution. Suspendu de ses fonctions en attendant le vote du Sénat, Collor démissionne le 29 décembre. Le Sénat continuera néanmoins de se pencher sur son dossier et le suspendra de ses droits politiques pour huit ans. Jugé par la Cour suprême sur les charges criminelles découlant de cette affaire, l'ex-président sera acquitté sur des points techniques. Ses droits politiques rétablis, Collor sera élu au Sénat en 2006.
Dans les médias...
Daniel Bastien, « Discours d'investiture d'Itamar Franco »
«...Les tendances populistes d'Itamar Franco (successeur de Collor), souvent soulignées au Brésil, le conduiront en effet, selon toute vraisemblance, à favoriser une discrète relance de la croissance économique, en panne depuis trois ans, afin de rendre la vie quotidienne des Brésiliens moins difficile. (...) La gradualité des mesures annoncées par Itamar Franco rassurera les milieux économiques brésiliens, inquiets d'un possible blocage des prix et des salaires et d'un éventuel retour au contrôle des changes. La Bourse de Sao Paulo a d'ailleurs réagi positivement hier aux propos du président. Vis-à-vis de l'extérieur, le président brésilien s'est également voulu rassurant en s'engageant à honorer les remboursements de la dette du Brésil (123 milliards de dollars), et à « normaliser les relations avec la communauté financière internationale ». La marge de manoeuvre de Brasilia est cependant toujours réduite, puisque le Fonds monétaire international maintient une énergique pression sur le Brésil, qui n'a toujours pas rempli ses engagements, sur le plan budgétaire notamment. »
Les Échos (France), 31 décembre 1992, p. 5.
Denis Hautin Guiraut, « Malgré sa démission à l'ouverture de son procès l'ex-président Collor a été suspendu de ses droits civiques pour corruption »
«...M. Collor n'a pas cessé de soutenir que ce qu'il appelait « un lynchage politique » provenait de l'opposition d'un certain nombre d'acteurs politiques et économiques hostiles à son programme de modernisation et d'ouverture. La thèse, parfois invoquée par ses fidèles, d'un « complot destiné à l'écarter du pouvoir » ne tient pas, même s'il apparaît que beaucoup de responsables économiques voyaient d'un mauvais oeil ce changement de cap après trente années de protectionnisme. Il est tout aussi vrai que « la croisade contre la corruption » menée dans l'affaire Collor a souvent été soutenue par des politiciens dont le moins que l'on puisse dire est qu'ils ne présentent pas toutes les qualités requises pour mener un tel combat. (...) c'est avant tout pour n'avoir pas perçu à temps la gravité des faits reprochés, pour avoir négligé la frustration de politiciens qu'il a souvent méprisés et pour avoir largement sous-estimé la réprobation d'une majorité de la population, que M. Collor a été acculé à la démission et condamné. (...) La chute de M. Collor est donc avant tout celle d'un homme qui, par négligence ou par calcul, s'est cru au-dessus des lois. L'exemplaire stabilité de l'ensemble des institutions brésiliennes pendant toute cette crise a démontré que la démocratie, avec laquelle les Brésiliens ont renoué en 1984 après trente ans de régime militaire, n'était ni aveugle ni dupe. Reste que cet épisode tombe au plus mal pour le pays. »
Le Monde (France), 31 décembre 1992, p. 5.
Éditorial
«...There's not the usual scent of political witch hunt about Mr. Collor's toppling. Indeed, Brazilians - though their government is in disarray and inflation continues at 25 percent monthly - were celebrating that he didn't fall the old-fashioned way, by military coup (or worse). The assumption of the presidency last week by Vice President Itamar Franco represented one of the few peaceful transitions of power in recent Brazilian history, and was widely regarded as representing the resilience of the new democratic tradition apparently taking hold there. But the celebration may be short-lived. If an interim government reverses course on fiscal belt-tightening and privatizing of state companies that Mr. Collor has pursued to get a grip on inflation, the country could well find its future stunted for years to come. (One of Mr. Franco's initial appointments was not reassuring.) A rollback in progress in Brazil would be especially devastating because it comprises 40 percent of Latin America's population and the lion's share of the region's economic activity, as well as forestlands vital to the ecology of the world. What a shame that would be. »
The Philadelphia Inquirer (États-Unis), 6 octobre 1992.
Gouvernance et gouvernement [ 29 décembre 1992 ]
Pays | Niveau de démocratie | Chef de l'État | Chef du gouvernement |
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![]() | Intermédiaire | Itamar Augusto Cautiero Franco |
Les informations précédentes renvoient précisement à la date de l'événement. Le niveau de démocratie est établi à partir des travaux de l'équipe de Polity IV. L'indice renvoie à la démocratie institutionnelle. Les noms des gouvernants sont établis à partir de nos bases de données les plus récentes. Là où on ne trouve aucun nom pour chef du gouvernement, il faut conclure que le chef de l'État est aussi, et sans intermédiaire, le chef du gouvernement, ce qui est le cas des systèmes présidentiels classiques (les États-Unis par exemple).